De l’extinction de responsabilité en matière criminelle
Dans deux articles précédents, nous avons parlé de responsabilité civile et pénale de toute
personne impliquée dans un acte criminel. Nous avons parlé aussi des auteurs directs et des
complices de ces derniers, «afin que nul n’en prétexte cause d’ignorance». Car il est temps de
finir avec cette tolérance qui nous plonge dans cette logique de volcan où des gens prennent
plaisir à commettre des crimes, et qu’il leur suffit de garder un profil bas, pour que tout aille
pour le mieux, comme s’ils n’avaient rien fait de mal.
Malheureusement, l’histoire nous montre que ces bandits ont bénéficié, non seulement
de nos dispositions pénales en invoquant la prescription, mais aussi de notre propre
complicité, soit par ignorance, soit par notre mentalité d’accepter l’inacceptable. Et le résultat,
c’est que nous avons des bandits à n’en plus finir et un État délinquant qui s’érige souvent en
face des victimes.
En effet, notre législation prévoit deux types de prescription. Il y a prescription pour la
peine prononcée par un jugement et la prescription de la poursuite.
Selon l’article 464 du code d’instruction criminelle, «Les peines portées par les
jugements rendus en matière criminelle se prescrivent par quinze années révolues, à compter
de la date des jugements».
Le cas qui nous intéresse le plus ici, c’est la poursuite. C’est-à-dire, les différentes
démarches légales devant aboutir à la condamnation du criminel et de ses complices, pour
rendre justice, non seulement aux personnes victimes, mais aussi à la société. Et c’est l’article
466 qui répond:
«L’action publique et l’action civile résultant d’un crime de nature à emporter la
peine de mort ou des peines afflictives ou infamantes, se prescriront après dix années
révolues, à compter du jour où le crime aura été commis, si, dans cet intervalle, il n’a été fait
aucun acte d’instruction ni de poursuite. S’il a été fait, dans cet intervalle, des actes
d’instruction ou de poursuite non suivis de Jugement, l’action publique et l’action civile ne se
prescriront qu’après dix années révolues, à compter du dernier acte, à l’égard même des
personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d’instruction ou de poursuite».
La prescription engendre la tyrannie et une violence interminable, notamment lorsque
ce sont des hommes au pouvoir qui ont commis des crimes. Ils nourrissent cette violence pour
faire passer le temps et bénéficier de la prescription.
Face à une telle situation, nous aurions besoin d’une loi qui élimine la prescription en
toute matière. Mais en attendant, porter plaintes reste la meilleure solution et la seule pour
l’instant qui peut nous empêcher de continuer de vivre ce malheur dans lequel la pègre
haïtienne, au pouvoir depuis plus de dix ans, nous amène.
Me Inseul Salomon
Avocat, sociologue