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Pour sauver Haïti, faut-il la détruire d’abord ?

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L’ancien général de la révolution, Henri Christophe, est connu pour cette déclaration explosive et transcendantale : «  Je ne vous livrerai la ville du Cap que lorsqu’elle sera réduite en cendres, et même sur ces cendres, je vous combattrai encore. » Ce message adressé au chef expéditionnaire français par le général haïtien, aussi poétique et patriotique, qu’on l’enseigne aux écoliers haïtiens dans les cours d’histoire, a caché pendant longtemps l’incompétence et la démagogie typique de ceux à qui on a confié la tâche de nous protéger.  Après un tel discours, le général a préféré mettre la ville à feu, sans vraiment affronter les forces de Leclerc.  Et même après le feu, il avait vite pris la fuite, sans honorer cette promesse de combattre l’armée napoléonienne sur les cendres de la ville.  Cette décision, jugée lâche et inappropriée par le général Dessalines, deviendrait la cause de friction entre ces deux grandes figures de nos héros nationaux.

Pourquoi est-il plus facile de brûler cette si belle ville au lieu de la protéger ?  Pourquoi ne pas s’opposer aux ennemis avec courage et dignité pour défendre sa maison, sa famille, sa patrie ?  N’était-ce pas un mauvais précédent dans notre histoire ?  C’est-à-dire à un criminel qui cherche à vous tuer, que vous allez vous suicider afin de ne pas lui donner ce privilège d’exécuter son acte macabre.  J’ai failli oublier que l’histoire nous raconte que le Roi Henri 1er, avait préféré se donner la mort au lieu d’ordonner l’exécution des suspects ou traîtres qui auraient travaillé contre le royaume du Nord, à la solde du Président Pétion, son ennemi juré qui dirigea l’Ouest et le Sud d’Haïti.  Hélas, entre lâcheté et bravoure, comment faire un bon choix quand on est politicien haïtien ?

Faut-il vous rappeler du Président Jean-Pierre Boyer qui ne voulait pas défendre sa nation contre la menace d’une éventuelle invasion et occupation par la France ?  Pour sauver Haïti de quelques coups de canons, il avait succombé aux menaces en sacrifiant l’économie de notre jeune nation avec une dette de 100 millions de francs.  Une obligation que nous avions pris 100 ans pour honorer et dont les séquelles sont encore présentes aujourd’hui.  Peut-on oublier la honte ressentie par toute une nation quand Tirésias Simon Sam avait baissé les bras devant la menace des Allemands durant l’affaire Luders ?

N’est-ce pas la peur des blancs qui expliquerait cette attitude dans plusieurs incidents de notre histoire ?  Si vous ne me croyez pas, allez vérifier par vous-même l’histoire de l’Amiral Killick. Oui, il s’est fait sauter avec son navire pour éviter sa capture, lisait le monde dans le New York times, dans le journal paru le 11 septembre 1902.  Peut-être  n’avez-vous pas pris le soin de comparer les caractéristiques de ce grand navire « La Crête-A-Pierrot », avec le navire de guerre allemand SMS Panther?  L’Amiral Killick disposait des canons de 16cm qui pouvaient atteindre une distance de plus de 20 000 pieds. Le SMS Panther, son plus grand canon de 12.5cm avait une portée inférieure soit 16 000 pieds. Quant à la vitesse, la Crête-a-Pierrot avait comme top speed 16 Knott(30 km/heure) et son adversaire 13 Knots(25 km/heure). Alors, pourquoi ce si prestigieux capitaine qui n’avait jamais hésité à bombarder les villes et les côtes d’Haïti, incluant le Cap-Haïtien, avait préféré couler son navire, au lieu de couler le SMS Panther avec tous les marins Allemands à bord ?  Il avait tous les avantages, un meilleur navire, de meilleurs canons, la vitesse et la connaissance des eaux territoriales.  En effet, je crois que toute théorie complotiste serait bienvenue pour élucider cette décision, car le bon sens y est absent dans ce scénario funeste.

Alors, notre lâcheté est-elle signe de docilité ou de civilité, de respect ou tout simplement de peur d’affronter tout adversaire étranger, tandis qu’au pays, nous sommes souvent sans pitié pour nos propres frères et sœurs ?

Un prétexte traditionnel

L’unique théorie traditionnelle qui puisse expliquer ces évènements, c’est que les bons soldats ne doivent  jamais hésiter à brûler tout le royaume, juste pour sauver leurs Rois.  Avant de manifester votre désaccord automatique, sachez que même nos voisins appliquent cette théorie chez nous. À titre d’exemple, en 1915 après plusieurs années de turbulences politiques en Haïti, les Américains avaient décidé d’envahir Haïti pour la sauver.  Cette invasion, suivie d’une occupation sanguinaire, coutât la vie a plus de 50 milles Haïtiens, sans compter les dégâts matériels et les changements radicaux effectués dans la politique haïtienne.  Et, malheureusement, ce ne fut pas un cas isolé.  Pour sauver l’île de la Navase de la mauvaise gestion des pécheurs haïtiens, le gouvernement américain s’est octroyé le contrôle de ce bout de terre qui officiellement fait partie de notre territoire national.  Ce territoire perdu est inaccessible aux Haïtiens.

Il y a environ trente ans, plus de vingt mille soldats américains avaient débarqué pour restaurer la démocratie en Haïti.  Encore une fois, ces sauveurs qui avaient leurs avions bombardiers étaient prêts à tout mettre à feu chez nous.  En 1994, après trois années d’embargo économique criminel qui n’avait d’autre objectif que de sauver le peuple haïtien en lui infligeant la faim, le président messianique, Dr Jean-Bertrand Aristide, en exil et entouré de ces anges gardiens blancs, étaient tous décidés à détruire Haïti pour la sauver des militaires putschistes.  Bizarrement, dix ans plus tard, en 2004 ces mêmes super héros étrangers viendraient enlever du pouvoir par la force, un président élu démocratiquement, pour sauver Haïti, une autre fois.  N’est-ce pas tragique ?

Révolutionnaires ou réactionnaires ?

Maintenant, quand on voit partout dans les médias locaux et internationaux, des assassins, des criminels, des kidnappeurs, des bandits notoires, des drug dealers, bref des terroristes, crier haut et fort, qu’ils viennent sauver Haïti, nous devons rappeler à ces gens leur contribution dans la destruction de la nation.  Vous voulez faire la révolution dans tout le pays tout comme vous l’avez fait dans vos quartiers populaires ?  En chassant les gens de biens, en détruisant les écoles, les hôpitaux ? Le business est interdit aux bons citoyens, sinon ils risquent la séquestration, la torture et l’assassinat ?   Vous bloquez les routes et rançonnez tous les passants, au nom de la révolution ?  Dites, comment vous protégez les femmes et les enfants quand vous les violer sans pitié ?  Les petits commerçants, les paysans, les Madan Sara, pourquoi vous détruisez leurs commerces ? Vous chassez tous les grands investisseurs, les grands commerçants, à cause de la couleur de leur peau ou de leurs noms de famille ?  Au lieu de travailler pour changer les bidonvilles en Pétion-Ville, vous préférez le contraire ?  Vous brûlez les maisons, des quartiers entiers, vous empêchez le ravitaillement en essence, en eau potable et en nourriture a des millions de citoyens. Est-ce la définition de la révolution ?  Mais quand allez-vous défendre le pays contre nos ennemis dominicains?  Vos armes sont-elles seulement capables de semer le deuil dans nos villes et comtés?  

Aux soi-disant amis bandits et ennemis, conseillers, criminels étrangers, sachez que le peuple haïtien n’a pas besoin des services des agents pseudo-révolutionnaires, des gangs et leurs alliés terroristes qui détruisent les institutions étatiques, mettent à feu et à sang notre nation.  Au nom de la République, je vous demande : combien de fois voulez-vous détruire Haïti sous prétexte de la sauver ?

Castro Joseph

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