Du délit d’initié
Le délit d’initié, c’est le fait de s’attribuer une certaine faveur, en fonction de sa position et des
éléments d’informations privilégiées dont on dispose.
Ce concept est d’abord et souvent utilisé dans les affaires, notamment lors des
passations de marchés. L’individu dispose de bonnes informations et les utilise en sa faveur,
au détriment des autres concurrents.
Le délit d’initié suppose donc:
- des informations importantes sur un marché;
- une position privilégiée, occupée par l’un des concurrents pour le marché;
- l’utilisation de ces informations à ses profits.
Le fait d’utiliser son pouvoir ou ses influences pour obtenir une faveur, ne suffit pas
pour commettre un délit d’initié. Il peut s’agir du trafic d’influences, d’abus de pouvoir,
d’abus de fonction, de concussions, qui sont tous des éléments de corruption et qui sont
prévus et punis par la loi.
Dans notre législation, à part le code pénal qui traitait déjà le phénomène de la
corruption, de la fraude, de la concussion, etc., deux autres textes viennent s’ajouter pour
apporter, non seulement certains éclaircissements, mais aussi leur support dans la lutte contre
la corruption. Il s’agit du décret du 8 septembre 2003, créant l’Unité de Lutte Contre la
Corruption (ULCC) et la loi du 12 mars 2014 qui porte sur la prévention et la répression
contre la corruption.
Pour le délit d’initié, cette infraction est prévue au Chapitre 3 de la loi, article 5.11, qui
se lit comme suit.
«Quiconque aura utilisé, pour son propre avantage ou pour celui d’un tiers, des
informations réservées ou privilégiées qu’il a obtenues dans l’exercice de ses fonctions et
portant sur la passation des marchés publics ou sur les perspectives d’évolution d’un marché
réglementé, est coupable de délit d’initié et est puni d’une peine d’un an à cinq ans de prison
et d’une amende de cinq cent mille gourdes, sans préjudice des dommages et intérêts
éventuels.»
Cette loi est le plus grand cadeau que l’on pourrait donner au peuple haïtien. Sans le
savoir, le jour de sa publication dans Le Moniteur, un arrêté est sorti, accordant un certain
privilège, ce que l’on pourrait qualifier carrément de trafic d’influence. L’on dirait que les
conseillers juridiques du Palais National n’avaient même pas lu le texte ou qu’ils croyaient
être tellement au-dessus de la loi qu’ils pouvaient se permettre n’importe quoi.
Aujourd’hui, si l’on prend le temps de réfléchir et de mettre en application cette loi,
pour les dix années du régime PHTK, c’est à peine si les plus justes seront sauvés.
Me Inseul Salomon
Avocat, sociologue