Les dirigeants haïtiens sont dans la même narrative. En fait, avec leurs pouvoirs, ils ne font
qu’aboyer de loin, comme les chiens qui voient une caravane passer, sans jamais oser
l’attaquer, et ceci est révélateur. La riposte est probablement rendue extrêmement périlleuse et
les ariélistes sentent qu’ils sont pris dans un piège et au pied du mur, avec le minuteur qui
tourne pour eux. Ils sont dans l’immédiat, pris de court et tout est à réévaluer, avant
d’avancer. Ils doivent agir, mais ils sentent que les groupes terroristes sont déjà sur le coup
d’après. Ils doivent percer le piège et tenter de connaître si le règlement du jeu est le même.
Enfreindre les lignes rouges, tricher encore, n’est plus un coup imprévu pour les terroristes
depuis longtemps, et le bluff ne fonctionne plus. Les groupes terroristes ont pris l’ascendant.
Situation complètement inacceptable, autant qu’impensable et déroutante. Le régime de facto
est de plus en plus désorienté. Les quatre points cardinaux se mettent à tourner, l’aiguille
devient folle…. Danger.
En effet, face à l’immobilisme de la communauté internationale, le gouvernement
haïtien veut s’appuyer sur les Forces Armées d’Haïti (FAD’H) pour rétablir la sécurité dans le
pays. Le Premier ministre Ariel Henry a affirmé, le vendredi 17 mars, qu’il comptait utiliser
les ressources des Forces Armées d’Haïti (FAD’H) dans la lutte contre l’insécurité en Haïti.
C’est une déclaration qui intervient alors que le gouvernement attend, depuis plusieurs mois,
une réponse favorable de la communauté internationale à sa demande d’assistance en matière
de sécurité. En marge d’une visite aux Forces Armées d’Haïti (FAD’H) ce vendredi, le
premier ministre Ariel Henry a fait savoir qu’il entend mobiliser cette institution, dans le
cadre de la lutte contre l’insécurité en Haïti, selon les informations disponibles sur le compte
Twitter de la Primature de la République. «Le Premier ministre, Dr Ariel Henry , vient de
visiter les Forces armées d’Haïti pour leur signifier, qu’en ces temps où la lutte contre
l’insécurité galopante est devenue la priorité numéro 1, le gouvernement entend mobiliser
toutes ses forces pour rétablir la sécurité». Cette sortie du chef du gouvernement intervient
alors que la crise sécuritaire s’envenime en Haïti. Le gouvernement haïtien attend depuis cinq
mois une réponse positive à sa demande d’une assistance militaire de la part de la
communauté internationale. Si plusieurs pays disent soutenir cet appel à l’aide, deux seuls, à
savoir la Jamaïque et le Salvador, se sont manifestés, pour l’instant.
Parallèlement, la Police Nationale d’Haïti (PNH) a toutes les peines du monde pour
faire face aux bandits qui terrorisent la population. Les cas de kidnapping sont en hausse,
alors que les affrontements entre gangs rivaux, dans plusieurs endroits de la capitale, causent
des victimes à longueur de journée. Au moins 60 personnes ont été tuées et 50 autres portées
disparues, dans les affrontements armés entre gangs rivaux, au bas de Delmas et à Bel-Air,
entre autres, du 28 février au 4 mars 2023, selon le Réseau National de Défense des Droits
Humains (RNDDH).
Les Forces Armées d’Haïti (FAD’H) se sont proposées pour aider à combattre
l’insécurité. Les Forces Armées d’Haïti qui ont accueilli 409 nouveaux soldats dans ses rangs,
en décembre 2022, a toujours affiché sa volonté d’aider les autorités à lutter contre
l’insécurité en Haïti. À la suite de l’assassinat des six policiers à Liancourt, en janvier 2023,
les Forces Armées d’Haïti ont indiqué être prêtes à «aider» la PNH, en attendant des autorités
compétentes qu’elles leur fournissent «les moyens et matériels nécessaires pour aider plus
efficacement la police à résoudre le problème de banditisme qui ronge le pays et empêche la
population de vaquer librement à ses activités».
La population haïtienne aussi pense que cette institution pourrait être utile dans le
combat pour rétablir la sécurité dans le pays. Un sondage, mené sur la situation d’insécurité
en Haïti par la société de conseil Diagnostic & Development Group (DDG), pour le compte
de l’Alliance pour la Gestion des Risques et des Activités (AGERCA), en janvier dernier, a
révélé que huit personnes sur dix croient que la PNH a besoin des Forces armées d’Haïti
(FAd’H), pour sécuriser le pays et mettre hors d’état de nuire les gangs armés. En outre,
l’appel du gouvernement de facto aux citoyennes et citoyens, leur demandant de se défendre
eux-mêmes, face aux bandits armés, traduit une absence de volonté politique de combattre la
criminalité en Haïti, estime l’organisme de droits humains Sant Karl Lévêque (SKL). «Si les
autorités n’ont pas assez de force pour combattre l’insécurité, elles devraient se rendre dans
les communautés pour s’organiser avec les citoyennes et citoyens, de concert avec la Police
nationale d’Haïti (PNH)», suggère le père Gardy Maisonneuve, directeur exécutif du SKL. Il
faut utiliser les citoyens comme vigiles, afin qu’ils puissent informer la PNH au sujet de la
présence d’individus suspects dans leurs zones, recommande l’organisme de droits humains.
Dans une note de presse, datée du lundi 6 mars 2023, le Ministère de la Justice et de la
Sécurité publique (MJSP) avait appelé les citoyennes et les citoyens à se défendre contre les
bandits armés, qui tentent de pénétrer de force dans leurs domiciles. «Dans le cas où un
individu armé pénètre chez vous avec violence, la loi vous autorise à vous défendre, selon les
prescrits des articles 272 à 274 du code pénal haïtien», souligne la note du MJSP. «La
population elle-même ne peut rien faire, face à des hommes lourdement armés. Les policiers
nationaux s’enfuient, eux-mêmes, face aux assauts des bandits», signale l’organisme Sant
Karl Lévêque. «Le gouvernement est là pour protéger la population. La PNH est entre les
mains du premier ministre de facto, Ariel Henry, et de sa titulaire au Ministère de la Justice,
Emmelie Prophète Milcé. Il est de leur devoir d’organiser la PNH pour protéger les citoyens».
Toutes les conditions sont réunies pour un éventuel éclatement d’une guerre dans le pays, car
l’État reste indifférent devant la situation d’insécurité et de misère, relève le Sant Karl
Lévêque. «La forme de violence existante vise à créer un chaos et une guerre civile. La
progression des gangs armés est possible à cause de l’absence de l’État, qui laisse dégrader la
situation sécuritaire».
Emmanuel Saintus