Les bons comptes font les bons amis. Certains d’entre nous sont trop polis et hésitent à demander
des comptes à leurs débiteurs. C’est cet excès de bienséance qui explique peut-être le fait que des
gens, comme dirait Toto Bissainthe, «qui ne devrait pas porter pantalons 1 », dirigent Haïti,
donnent des leçons, tandis qu’à l’échelle humaine, ils ne dépassent pas les pâquerettes. On
commence avec du piment fort. Si vous êtes de la nation des braves, suivez-moi. De toute façon,
essayez.
On pourrait prendre le raccourci Nature/Culture, pour faciliter le cheminement. Rappelez-
vous que si, à la naissance, on vous abandonnait dans la nature et que, par miracle, vous arriviez
à survivre, vous ne sauriez jamais vous tenir debout et vous ne parleriez jamais le langage des
humains. C’est pour vous rappeler que même ces gestes basiques ne sont pas donnés. C’est le
fruit d’un long apprentissage. Passez ces caractéristiques, d’une génération à l’autre, est un
devoir, même s’il n’y a aucune sanction, si vous êtes défaillants.
Le temps complexifie les choses. De l’homo habilis à l’homo sapiens, nous avons pris
beaucoup d’avantages sur les autres espèces. Une vie intelligente et consciente est un phénomène
assez rare dans l’univers. Nos ancêtres ont compris qu’il fallait une certaine manière de vivre
ensemble, pour survivre et maintenir ces acquis. Pour être différents des scorpions, des vipères,
des chiens, des loups et des cabris, nos ancêtres ont commencé à établir des normes. Parmi les
toutes premières, certainement, il y a eu des interdits. L’interdiction de l’homicide, du
cannibalisme et de l’inceste sont les premières lignes de démarcation entre animalité et humanité.
Peut-être que vous remarquerez de quel côté se trouvent celles et ceux qui sont associés aux
gangs.
L’Humanité est un construit un peu plus complexe. Il y a eu le professeur Jean Paul
Sartre qui a apporté sa pierre dans la construction de cet humanisme. «L’homme existe d’abord,
[…] L’homme n’est rien, il ne sera qu’ensuite, et il sera tel qu’il se sera fait». Cela pose quelques
soucis mais il serait tellement humain de faire comprendre à tous la pensée de Sartre. Mais ceux
qui dirigent le pays ont un manque grave d’humanité. Ils laissent l’éducation entre les mains des
gangsters.
«L’homme sera tel qu’il se sera fait». Il y a eu des hommes exceptionnels qui ont mis la
barre à une certaine hauteur, et cela dérange. Toussaint, Dessalines, Christophe ont ébranlé
l’édifice colonial esclavagiste. Il y a quelques énergumènes parmi nous qui ont pour tâche de
ralentir la marche du peuple vers la liberté et le progrès. Ils n’ont pas compris que c’est un
combat d’arrière-garde. Libre à eux de rester à l’état d’animal, qu’ils se rappellent, aussi féroces
peuvent-ils être, que l’homme a toujours vaincu.
Ne renonçons pas à nos valeurs. Vwazinaj se fanmi. Manje kwit pa gen mèt. Tout moun se
moun. Laissons passer les vaches déguisées en fleurs. Nous n’abdiquerons pas.
Guy Craan Md, MSc.
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1 Loraj Kale, chanson de Toto Bissainthe