«Le juste périt, et nul n’y prend garde ; les gens de bien sont enlevés, et nul ne fait attention. Que c’est par suite de la malice que le juste est enlevé», avait écrit Esaïe. N’est-ce pas le moment de rompre le tissu de mensonges et de reconnaître que la donne s’est inversé et que désormais c’est la population que les gangs assiègent ?
Les gangs armés sont en mouvement pour la conquête d’autres territoires. Des hommes lourdement armés ont terrorisé la commune de Carrefour, particulièrement Mariani, le vendredi 4 mars 2022. Il s’agit des malfrats, ayant Ti Lapli à leur tête, qui voulaient s’installer à Mariani. En représailles, un policier a été tué. Cet agent, faisant partie de la 22ème promotion de la Police Nationale d’Haïti (PNH), a été décapité. Il tentait de faire échec aux hommes de Ti Lapli. En effet, des policiers du Commissariat de Carrefour ont dû intervenir pour repousser les bandits.
Le mercredi 2 mars, l’une de ces opérations les plus angoissantes a eu lieu avec en toile de fond deux (2) médecins enlevés au sein d’une clinique, par des hommes en uniforme de police, accompagnés d’un avocat. «Mwen wè nèg ak inifòm polis, gwo zam nan men, k ap soti ak yon moun ak vès ki pote yon kachnen, Yo ap mache ak li byen vit tankou y ap fòse l mache epi yo rantre nan yon machin zo reken ki tente a demi. Epi machin lan met tèt li sou Bwavèna, li ale», selon les explications d’un témoin. «Se lè yon moun ki abiye an ajan sekirite sot nan espas la epi l ap rele kidnaping epi 2 fanm aje ki soti nan espas la tou ap kriye, mwen vin remake se kidnaping, paske nèg yo pa t tire», a poursuivi le témoin. Les docteurs Pierre Boncy et D’Alexis Michel ont été enlevés par des individus, le mercredi 2 mars 2022, à la Ruelle Berne, à l’intérieur de la clinique Microlab où ils travaillaient. Ces individus armés se faisaient passer pour des policiers, accompagnés d’un avocat.
Ce double cas de kidnapping vient d’allonger la liste des citoyens kidnappés ces derniers jours. Personne n’est exempt face à cette situation qui devient un commerce rentable pour les hommes armés et qui, du coup, appauvrit la famille haïtienne qui ne sait à quel saint se vouer.
Dans la même lignée, le jeudi 3 mars, dans l’après-midi, des bandits lourdement armés portant des uniformes de la Police Nationale d’Haïti (PNH) ont enlevé Patrick Moussignac, le Président Directeur Général (PDG) de la Radio Télévision Caraïbes (RTVC), sur la rue Capois non loin de la station. Cet enlèvement, annoncé par des journalistes de RTVC, a fait vivement réagir les résidents de plusieurs zones du centre-ville dont la Rue Capois, Ruelle Roi, Champ-de-Mars, Rue Chavannes, entre autres, qui ont érigé des barricades et bloqué toute la circulation pour exiger la libération du PDG de la RTVC. Peu de temps (moins d’une heure) après son enlèvement, les ravisseurs ont libéré sans rançon Patrick Moussignac dont le retour à la rue Chavannes a reçu un accueil en liesse de la population sympathisante.
À noter que c’est le troisième cas de kidnapping enregistré au média, en l’espace de deux mois. L’animatrice de l’émission SOS Solitude, Caëlle Jean-Baptiste, et l’administrateur de la RTVC, Marc Théagène, sont les deux autres victimes.
Le vendredi 4 mars, un employé de l’Autorité Portuaire Nationale (APN) a été victime de kidnapping. Son enlèvement a lieu à la rue Pavée, Port-au-Prince, alors qu’il se rendait au travail. Il s’agit d’Evens, qui a été kidnappé. Depuis lors, ses camarades de travail n’ont pas eu de nouvelles.
Nouvelles mesures de la PNH contre les faux policiers
Dans une note, Frantz Elbé, le Directeur Général a. i. de La Police Nationale d’Haïti (PNH), porte à la connaissance de la population « […] qu’un groupe d’individus lourdement armés, se faisant passer pour des membres d’unités spécialisées de la PNH, persistent à commettre des actes criminels sur la voie publique et dans certaines entreprises» précisant que ces individus sont très agressifs et fréquemment cagoulés, vêtus de tenues de combat portant la mention «Police» et utilisent des véhicules sans plaque d’immatriculation ou munis de plaques altérées.
Pendant que les unités concernées de la PNH s’attèlent à identifier et à rechercher ces individus pour qu’ils répondent de leurs forfaits, Frantz Elbé estime opportun d’aviser toutes les composantes de la société qu’un ensemble de mesures non exclusives a été adopté en vue de faire face à la situation.
- «Dorénavant, tout véhicule de police opérant sur la voie publique doit être muni de plaque d’immatriculation identique à l’avant et à l’arrière, marqué des numéros de plaque et de l’inscription « police » sur les côtés latéraux du véhicule et de l’emblème de la PNH sur le capot.
- À l’exception des masques sanitaires, le port de cagoules, de mouchoirs et de toutes autres accessoires altérant l’uniforme de police ou de l’unité spécialisée en service, est formellement interdit lors des contrôles routiniers sur la voie publique.
- La Police Nationale compte sur la collaboration de toutes les couches de la société et invite toute personne témoin d’une violation de ces dispositions, à appeler au numéro (509) 3838-1111, en vue de l’aider dans l’accomplissement de sa mission et mettre les bandits hors d’état de nuire.
De plus, un ancien policier haïtien, Tanis Philome, considéré comme très dangereux par les autorités haïtiennes, activement recherché en Haïti et sous mandat d’arrêt international (Interpol) dans le cadre de l’assassinat du Président Jovenel Moïse, a été arrêté mercredi vers 16h30 à la frontière de Dajabón, alors qu’il tentait d’entrer sur le territoire dominicain avec le passeport numéro R-10885350. Son arrestation a impliqué des membres de la 4e Brigade de l’armée dominicaine, du Corps Spécialisé en Sécurité Frontalière (Cesfront) et des agents de la Migration. Les autorités dominicaines, sur certification légale, ont remis le détenu entre les mains des autorités policières haïtiennes autorisées, sous haute protection.
Emmanuel Saintus