La Constitution de 1987 fixe le mandat de chaque élu, et ce, des membres de CASEC, jusqu’au Président de la République. Les élus locaux, à savoir: membres du Conseil d’Administration de Section Communale (CASEC), Maire, Député, ils sont tous élus pour un mandat de quatre (4) ans; et ce sont les articles 63, 68 et 92 qui fixent leur mandat.
Pour les Sénateurs, c’est l’article 95 qui dicte la règle du jeu. Tandis que pour le Président de la République, c’est l’article 134-1 qui précise que le président est élu pour cinq (5) ans.
Depuis 1991, le seul poste pour lequel l’échéance constitutionnelle est respectée, c’est celui du Président de la République. D’ailleurs, un bref rappel historique et chronologique peut nous permettre de voir plus clair. Ainsi, retournant à notre histoire, on aura:
- 1991-1996: mandat de Jean-Bertrand Aristide;
- 1996-2001: mandat de René G. Préval;
- 2001-2006: 2e mandat de Jean-Bertrand Aristide;
- 2006-2011: 2e mandat de René Préval;
- 2011-2016: mandat de Michel Martelly;
- 2016-2021: mandat de Jovenel Moïse.
Si la Constitution du 29 mars 1987 n’avait pas prévu certaines anomalies, les amendements en 2011 avaient apporté toutes les corrections possibles, notamment les règles et conditions de l’exercice des mandats de tous les élus. Et, ce sont ces amendements aussi qui viennent expliciter les possibilités que des élus ne jouissent pas de la totalité du temps de leur mandat et ce, pour éviter de déranger le temps constitutionnel. Cela étant dit, la Constitution ne pardonne pas les impondérables, n’admet aucune excuse. C’est pourquoi, malgré les effets tragiques du séisme du 12 janvier 2010, il y a eu quand même des élections.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que toute dérogation à l’ordre constitutionnel, peut entraîner la dictature. Lescot n’avait pas réussi il est vrai, mais Duvalier avait bel et bien réussi. Et Jovenel a tous les moyens, voire même plus que Duvalier, pour réussir. Il a son armée. Il a déjà vassalisé la police. Il crée sa milice. Ajouté, à tout cela, il institue déjà un régime liberticide, avec son décret publié réprimant ce qu’il appelle le terrorisme.
De toute façon, le 7 février 2021, ce sera la fin du mandat constitutionnel de Jovenel Moïse. Et nous avons plusieurs précédents historiques sous l’empire de la Constitution de 1987. Nous avons :
- le cas d’Aristide retourné au pouvoir après avoir passé 3 ans en exil et qui n’avait pas prorogé son mandat pour partir en 1998;
- nous avons aussi le cas de Michel Martelly qui n’avait pas exigé le 14 mai pour quitter le pouvoir;
- de même pour Boniface Alexandre qui n’avait joui que le reste du mandat d’Aristide (2004-2006).
Donc le temps de Jocelerme Pivert sort du temps constitutionnel de Jovenel Moïse. Et c’est l’article 134-2 qui le prévoit ainsi quand il dit: «Au cas où le scrutin ne peut avoir lieu avant le 7 février, le président élu entre en fonction immédiatement après la validation du scrutin, et son mandat est censé commencé le 7 février de l’année de l’élection, quelle que soit la date de l’élection.»Or l’année de l’élection n’est autre que 2016 (26 novembre 2016)
Fort de toutes ces considérations, le 7 février 2021, si Jovenel reste au pouvoir, il sera de facto mais non de jure. Il sera considéré comme usurpateur de titre et de fonction. S’il arrive à s’imposer au reste de la population, ce sera la dictature. Inversement, s’il n’arrive pas à s’imposer, ce sera le chaos total.
Me Inseul Salomon
Avocat, sociologue