Quand est-ce qu’un pouvoir est-il de facto?
Le pouvoir étant la capacité d’influencer le comportement de l’autre ou des autres, il peut s’exercer
de diverses manières. On obtient donc le pouvoir soit par la violence physique pure et dure, soit par
l’influence ou l’autorité. On peut contraindre quelqu’un à obéir par la force; tout comme il peut
obéir en reconnaissance de l’autorité de celui à qui il obéit et envers qui, il sait avoir le devoir
d’obéir.
Dès lors que le pouvoir se définit par la relation de commandement à obéissance, on le
trouve dans toutes les sphères de la société. Et parmi les sphères, il y en a trois dans lesquelles, on
peut voir beaucoup plus facilement, la manifestation du pouvoir. Ce sont: la famille, la religion et la
politique (politique dans le sens du politikos). Restons dans le cas qui nous concerne, qu’est le
pouvoir politique.
Il existe plusieurs moyens de prise du pouvoir politique. Et ceux-ci sont définis, soit dans
des documents résultant d’un consensus social (ce document peut être la constitution), soit de
manière tacite. De nos jours, il est difficile d’avoir un pouvoir qui s’exerce sans un document
définissant les règles de la dévolution du pouvoir. En Haïti, la constitution de 1987 est celle qui,
jusqu’à présent, régit la manière pour arriver au pouvoir, notamment au niveau présidentiel. Ce sont
les articles 134, 134 bis, 134-1, 134-2, 134-3 de la constitution.
«Le Président de la République est élu au suffrage universel direct, à la majorité absolue
des votants, établie à partir des votes valides, conformément à la loi électorale. Si cette majorité
n’est pas obtenue au premier tour, il est procédé à un second tour. Seuls peuvent s’y présenter les
deux (2) candidats qui, le cas échéant, après retrait de candidats plus favorisés, se trouvent avoir
recueilli le plus grand nombre de voix au premier tour.» (Article 134).
En l’article 134 bis, elle poursuit: «À l’occasion des élections, le candidat à la Présidence le
plus favorisé au premier tour, n’ayant pas obtenu la majorité absolue, est déclaré vainqueur dans le
cas où son avance par rapport à son poursuivant immédiat est égale ou supérieure à vingt-cinq
pour cent (25%).»
La constitution fixe non seulement les conditions pour accéder au pouvoir, mais aussi la
durée et les limites. (Article 134-1, 134-2, 134-3, 136 jusqu’à 147).
Ce sont les voies légales et constitutionnelles. Cependant, il n’y a pas que les voies légales et
constitutionnelles. Celui qui se sent capable et qui dispose des moyens suffisants pour accaparer le
pouvoir, il pourrait toujours le faire. Ce sont ces actes qu’on appelle: coup d’État, coup de force,
putsch, etc…
À la différence, les dirigeants issus de ces manœuvres exercent le pouvoir en dehors de ce
qu’on appelle, à juste titre, la légitimité. (Legitimus, fixé par les lois, conforme aux lois). Ils se sont
imposés de fait. D’où l’expression: de facto, contrairement à ceux qui ont été élus, selon les règles
de Droit, d’où de jure.
Enfin, tout pouvoir pris en dehors des conditions légales et constitutionnelles, est un pouvoir
de facto.
Me Inseul Salomon,
Avocat, sociologue