Maxihen Lazare, photojournaliste du média en ligne RDI, a été tué par balle et est décédé sur place. Trois autres journalistes ont été blessés, dont deux par balles, et le troisième par un jet de pierre : Sony Laurore, de Laurore News TV, Yves Moïse, de RCH 2000 et Alvarez Destiné, de Lakay TV. Lors de cette fusillade, des blessés ont été également rapportés par des témoins chez les manifestants.
L’incident s’est produit le mercredi 23 février. La manifestation des ouvriers du secteur textile, qui refusaient le salaire minimum journalier de 685 gourdes (+37%) décidé par le Gouvernement et continuaient de réclamer un salaire minimum journalier de 1 500 gourdes, a viré au drame, lorsque des hommes lourdement armés, portant des cagoules et dont le véhicule essuyait des jets de pierres, ont ouvert le feu sur les manifestants.
Des témoins ont accusé des agents de police d’être à l’origine des tirs, réalisés depuis un véhicule qui circulait apparemment sans plaque d’immatriculation. Jacques Sampeur, le président de l’Association Nationale des Médias Haïtiens (ANMH) a déploré cette nouvelle attaque contre la presse. «Nous sommes en face du flou très grave, très dangereux, puisque, des fois, on est victime du banditisme comme tout le monde, et des fois aussi, la presse est victime de l’armée régulière, de la police régulière. Nous sommes pratiquement à bout de souffle. Nous condamnons tous les jours. Il y a les dérapages policiers, on a l’impression qu’on ne respecte plus la presse et ça, c’est dangereux et c’est déplorable.»
Face aux accusations de certains témoins, la police a annoncé qu’une enquête avait été ouverte auprès de l’inspection générale de la PNH, en plus de celle ouverte par la police judiciaire. Le directeur général a. i. de la PNH, Frantz Elbé, s’est entretenu, le vendredi 25 février 2022, avec des membres de la famille du journaliste, Maxihen Lazarre, des journalistes et Me Arnel Rémy. Frantz Elbé a dit renouveler sa volonté pour que lumière soit faite sur l’assassinat du journaliste Maxihen Lazarre, précise une note de la PNH. Par cette rencontre, le directeur général de la PNH, accompagné de l’IGC Fritz Saint-Fort, l’I.G. Frédéric Leconte, directeur de la DCPJ, le DCPA Joanis Canéus, et Garry Desrosiers, porte-parole de la PNH, voulait mieux se renseigner sur l’incident qui s’est produit lors de cette manifestation et qui a coûté la vie à un journaliste. Deux blessés ont été aussi enregistrés dans le camp des travailleurs de la presse. Le DG Frantz Elbé et les autres hauts gradés de la PNH souhaitent que lumière soit faite autour des informations faisant croire que des policiers seraient impliqués dans cet incident.
Par ailleurs, le doyen du tribunal de première instance de Port-au-Prince, le juge Bernard Saint- Vil, a désigné le juge Chavannes Étienne pour mener l’instruction sur l’assassinat du journaliste Maxihen Lazarre. Cette désignation de l’administrateur du TPI de la Capitale intervient à la suite du dépôt d’une plainte contre X au cabinet d’instruction, le jeudi 24 février 2022.
Réagissant à cette journée de violence, le Premier Ministre de facto, Ariel Henry, a déclaré: «tout en s’engageant à garantir la liberté de manifester, dans le respect de la loi et des valeurs républicaines, le Gouvernement rappelle la responsabilité des pouvoirs publics d’assurer l’ordre et la sécurité, en vue de rétablir la paix. Je déplore la mort du journaliste Lazarre Maxihen, survenue lors des manifestations des ouvriers, ce mercredi. Je condamne également les violences qui ont causé des blessés. Je présente mes sympathies à la famille du défunt, ainsi qu’aux autres victimes de ces actes brutaux.»
Sur ce même dossier, dans une note, le Regroupement des Journalistes Innovateurs d’Haïti (REJOUIH) a déclaré avoir appris avec indignation la nouvelle de l’assassinat du photojournaliste, Maxihen Lazarre, le mercredi 23 février 2022, ajouté aux blessures de trois autres, dans l’exercice de leur métier. Pire encore, le REJOUIH a la confirmation que le meurtre a été perpétré par des agents de la Police Nationale d’Haïti, à bord d’une voiture flanquée du nom de l’institution policière. Par conséquent, le Regroupement des Journalistes Innovateurs d’Haïti dénonce avec la plus grande fermeté et la dernière rigueur ces agissements récurrents et inacceptables des policiers envers les journalistes, et exige les autorités administratives de la Police Nationale d’Haïti à s’activer pour identifier et punir les policiers coupables de ces actes. En outre, le REJOUIH entend accompagner, dans la limite de ses possibilités, les parents des journalistes victimes, dans cette pénible circonstance. Pour finir, le REJOUIH encourage les journalistes à continuer d’exercer leur métier avec professionnalisme, tout en réitérant sa volonté de poursuivre sa lutte pour une presse libre et utile.
Emmanuel Saintus