Nommé Directeur Général de la Police Nationale d’Haïti dans des conditions illégales, Léon a
passé plus d’un an à la tête de la Police. Crétinisme, incompétence ou malhonnêteté, la
criminalité allait augmenter jusqu’à faire vivre le spectacle odieux qu’est l’assassinat de Jovenel
Moïse, jusqu’alors président en fonction, chez lui et en son domicile privé. Certains diraient
président de facto, mais président quand même. Et en tant que tel, il était celui de qui Léon
Charles pouvait recevoir certaines instructions.
Responsable au plus haut niveau de la sécurité du pays, le commun des mortels devrait
compter sur lui. Pourtant, même le président de la République n’avait pas cette garantie. En
témoigne cet assassinat crapuleux, réalisé dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021.
L’on a procédé à des dizaines d’interpellations et d’arrestations au cours desquelles, un
grand nombre de policiers et de personnalités de la société civile sont déjà sous les verrous. Et le
dossier est confié à un juge d’instruction, au tribunal de première instance de Port-au-Prince.
Entre-temps, Léon Charles est nommé, encore en dehors de la loi, ambassadeur d’Haïti à
l’Organisation des États Américains (OEA). À la suite de cette convocation du juge Gary
Aurélien, on dit qu’il invoque déjà son statut de haut fonctionnaire de l’État, ce qui exigerait une
procédure un peu particulière.
Effectivement, l’article 90 du code pénal haïtien interdit à tout officier de police
judiciaire, tout officier du ministère public (les parquetiers), tout juge, de convoquer un haut
fonctionnaire public, sans l’autorisation du président de la République. Dans ce cas, le juge se
trouverait dans l’obligation de s’adresser d’abord au président qui, par une correspondance
adressée à lui, donne son autorisation.
Cependant, dans un arrêt en date du 27 février 2007, la Cour de Cassation de la
République avait tranché en affirmant qu’il n’existe pas un texte formel désignant quel commis
est un haut fonctionnaire ou non.
Les avocats de Léon Charles peuvent s’accrocher à l’article 90 du code pénal, comme le
juge peut s’appuyer sur l’arrêt de la Cour de Cassation. Et la bataille peut être longue.
Me Inseul Salomon
Avocat, Sociologue