Les nouvelles technologies de l’information et de communication, les avancées du numérique, et surtout les réseaux sociaux dont: Facebook, Twitter, WhatsApp et Instagram, facilitent l’accessibilité de l’information, en temps réel ou en boucle, avec leurs enjeux de taille. En fait, chaque utilisateur et utilisatrice d’un réseau social prétend être un ou une journaliste. Du moins, c’est une personne qui a la possibilité de créer des contenus auxquels on accole volontiers le titre d’informations. C’est ainsi que toute personne est susceptible, à la limite des législations nationales, régionales (le cas de l’Union Européenne), et aussi selon la politique de la plateforme en question, de vous bombarder d’informations, y compris de fausses.
En Haïti, et comme partout dans le monde, la presse fait face aux pressions constantes des technologies du numérique. Ainsi, de nouvelles stratégies doivent être développées constamment par les organes de presse, proprement dits, pour pouvoir y résister. Certes, la presse est devenue de plus en plus numérique, et donc bénéficie d’une accessibilité presqu’en tout temps. En effet, la presse écrite, timidement pour la plupart des médias, se convertit au numérique, avec des méthodes variées, notamment l’abonnement prépayé et le développement des applications. D’autres médias jouent la double stratégie: ils sont à la fois dans le papier imprimé et dans le numérique (accès en ligne). En ce qui concerne ce qu’on appelle Médias en ligne, Haïti n’en manque pas. Alors quelles sont leurs activités? Qu’elle est la fiabilité de leurs contenus (informations)?
Qu’il soit la presse parlée, télévisée, écrite ou des médias en ligne, les principes du journalisme, de déontologie surtout, devraient être au cœur du métier. Dans le cas des médias en ligne, on constate depuis moins de dix (10) ans, en Haïti, une prolifération de ces «institutions». Celles-ci fonctionnent, les plus crédibles peut-être, au sein de l’Association Haïtienne des Médias en Ligne (AHML), depuis 2016. Les médias en ligne, qui sont aussi confrontés à des problèmes de publicité, et qui se veulent dispensant des informations en temps réel, en vue de se tailler une place dans le paysage médiatique, sont constamment à la recherche du Scoop. De ce fait, ils cherchent à être les premiers à relayer une information, surtout si elle est sensible.
Quel en est l’intérêt? Il s’agit une quête de légitimité pour les premières consultations. Ainsi, par l’accroissement de sa popularité, ils pourraient décrocher un contrat de publicité, comme c’est la première source de revenus d’un média. N’ayant pas une possibilité d’interactivité, comme les médias traditionnels (radios et télévisions), les médias en ligne sont donc obligés de se forger une audience, soit en raison de l’instantanéité de l’information qu’ils donnent, soit en raison du titre accrocheur de leurs articles. Étant à la recherche du scoop, les contenus de leurs articles laissent souvent à désirer. L’intérêt primordial reste qu’ils publient une information en premier.
Ces médias en ligne, sont-ils en ligne vraiment? Quelques rares médias haïtiens en ligne peuvent oser contempler la possibilité d’avoir un personnel opérationnel, un lieu de travail, ainsi que des matériels et des équipements du métier. D’ailleurs, ils restent totalement en ligne. Bref! Avoir une page Facebook, c’est déjà une condition pour se déclarer être un média en ligne. Nous ne parlons pas encore d’avoir un site Internet, un blog, des équipements visuels pour couvrir un évènement, et même en faire le montage. Là, on est plus qu’un média en ligne. Tout ceci pour dire, combien ces médias fonctionnent dans l’amateurisme le plus complet. Généralement, ils se réfugient dans le déni total du code déontologique du métier de journalisme, car ce qui compte pour eux, c’est le scoop. Les médias en ligne affichent un comportement qui jette le doute sur la profession de journalisme. Au risque de tout, et même de leur vie, les «journalistes» de ces médias, peuvent inviter et diffuser, en direct, des hommes avec des armes extrêmement lourdes. Ce faisant, quel message on envoie? Pour pouvoir rester fidèle à la diffusion de l’information en temps réel, les contenus de leurs articles, pour nombre d’entre eux, sont synonymes de catastrophe en écriture journalistique. En effet, aucune règle n’est respectée. «On écrit, et quelqu’un lira de toute façon». C’est derrière peut-être cette logique qu’ils prennent force.
Dans la limite de leurs moyens en tout genre et dans l’indifférence totale des institutions de régulation en Haïti, les médias en ligne, par leur croissance exponentielle, représentent un danger, en raison de la recherche du Scoop, à tout prix. Cela les amène à partager de l’information sans aucune analyse; soit par la création/fondation facile. Cela sous-tend que tout le monde aspire à être propriétaire d’un média en ligne. Et en raison de la faiblesse des moyens financiers et techniques dont ils disposent, les propriétaires de ces médias en ligne sont appelés à couvrir l’indécence et même à faire l’apologie du crime. En conclusion, si rien n’est fait, les médias en ligne finiront par tuer le journalisme.
Job Pierre Louis