L’insécurité alimentaire dans laquelle vivent des centaines de personnes en Haïti, a atteint un niveau sans précédent. L’économiste Enomy Germain a fait savoir qu’Haïti a battu tous les records en termes de mauvaises performances, lors de l’exercice fiscal 2018-2019. Citant, entre autres :
– une dépréciation de la gourde de plus de 30% (une première en 20 ans) ;
– une inflation annuelle proche de 20% ;
– une croissance qui pourrait être négative -1% (une première depuis 2010) et plus de 2,6 millions de personne en situation d’urgence alimentaire.
En effet, l’instabilité socio-politique, les violentes manifestations antigouvernementales de l’opposition, les blocages des routes et l’insécurité en Haïti, notamment ces dernières semaines, ont eu de graves répercussions sur les programmes d’aide humanitaire de l’ONU et des ONG qui travaillent dans le pays, a expliqué le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) des Nations Unies. En conséquence, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a été contraint de suspendre, depuis le 16 septembre dernier, ses livraisons de vivres aux écoles, et seulement 39 % des centres a reçu les produits de base, dans le Sud où la situation est particulièrement délicate. «Si la situation se poursuit, des milliers de personnes, déjà confrontées aux conséquences d’une grave insécurité alimentaire, seront encore plus durement touchées, car l’aide alimentaire ne leur parviendra pas» a accentué l’OCHA qui a rappelé, qu’au début de cette année, il y avait 2,6 millions d’Haïtiens dans l’insécurité alimentaire et que le nombre avait depuis probablement augmenté. Selon l’agence onusienne, le secteur de la santé «est probablement le plus touché », étant donné que les hôpitaux sont confrontés à des « défis significatifs » pour rester opérationnels, principalement en raison du manque de carburant et de l’impossibilité de s’approvisionner en fournitures médicales. À cet égard, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a assuré qu’elle soutiendrait le Ministère haïtien de la Santé publique, «dans toute la mesure du possible». L’instabilité affecte également le système éducatif. La rentrée scolaire a eu lieu le 9 septembre mais, depuis le 16 septembre, de nombreuses écoles ont fermé leurs portes, principalement à Port-au-Prince, aux Cayes et au Cap-Haïtien, tandis que dans les zones rurales, les écoles fonctionnent avec un personnel réduit. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, on estime que plus de 2 millions d’enfants et d’adolescents ne peuvent pas aller à l’école, en raison de la situation actuelle. À noter que l’ONU a demandé 126,2 millions de dollars au pays membres pour aider 1,3 million des 2,6 millions de personnes nécessitant une assistance d’urgence en Haïti, mais, à ce jour, seulement 26,4 millions de cette somme, soit 21 %, ont été reçus.
Emmanuel Saintus