Les relations haïtiano-dominicaines n’ont jamais été très harmonieuses, et leur point mort n’est jamais trop loin. Elles sont généralement d’une grande volatilité et souvent assez tumultueuses. Depuis un mois, le marché binational, situé entre Anse-à-Pitres et à Pedernales, est fermé, à la suite d’une décision unilatérale du maire de Pédernales, Luis Manuel Feliz Matos. Les tentatives entreprises les 6 et 9 avril par ce dernier pour rouvrir le marché ont toutes échoué, à cause de l’absence des Haïtiens, encouragée par le maire haïtien de la commune d’Anse-à-Pitres, Harry Bruno. Dans ce conflit frontalier, le maire dominicain accuse le maire Brunot de bouder des rencontres de négociation et la réouverture du marché. L’élu haïtien de la ville d’Anse-à-Pitres, pour sa part, assume sa position et pose ses conditions avant la réouverture du marché binational. Parmi ces conditions, il y a celles-ci : toute rencontre entre les autorités dominicaines et celles d’Haïti sur la réouverture du marché binational doit se tenir sur la frontière séparant les deux pays, sur « un terrain neutre » ensuite les Haïtiens qui ont dû laisser Pedernales, les pieds à leur cou le mois dernier, à la suite à des menaces de représailles d’extrémistes dominicains, à cause de l’assassinat d’un couple dominicain dont deux frères haïtiens sont suspects doivent obtenir la garantie de leur sécurité, à leur retour. Le maire Bruno assure que la réouverture du marché n’aura pas sa bénédiction tant que les autorités dominicaines n’auront pas donné des garanties formelles sur la sécurité des ressortissants haïtiens. Le marché dit binational n’est en réalité qu’un espace de vente de produits dominicains. Les commerçants haïtiens ne peuvent qu’y revendre des vêtements usagés, achetés en République dominicaine. Le maire haïtien Harry Bruno exige qu’à la réouverture du marché, les marchands haïtiens puissent vendre leurs produits sans aucune restriction, y compris les marchands de vivres, légumes et fruits a-t-il dit. Durant une rencontre qui devait avoir lieu le jeudi 12 avril 2018, le maire comptait également exiger la restitution de plusieurs yachts d’Haïtiens saisis de manière injuste par les Dominicains, une attitude de grandeur d’âme de la part du maire d’Anse-à-Pitre qui est tout à son honneur.
Le maire de Pédernales, Luis Manuel Feliz Matos, et ses adjoints, Juan Gonzalez et Miguel Matos, se sont présentés au marché binational où ils ont attendu le maire haïtien Bruno Jarry, pour participer à une réunion préliminaire avant la réouverture, mais le maire haïtien ne s’est pas présenté. M. Matos a fait savoir que le refus de son homologue d’Anse-à-Pitres vise à faire pression sur les acheteurs de son pays, afin qu’ils n’aillent pas au marché ou dans les magasins de Pédernales, encore moins de participer au marché binational des lundis et vendredis. Il faut cependant rappeler que c’est ce même maire Luis Manuel Feliz Matos qui avait annoncé la fermeture du marché binational, jusqu’à ce que les autorités haïtiennes livrent un présumé coupable dans le double meurtre de Julio Reyes Pérez Matos y Neida Féliz Urbaez. Cette décision s’est retournée contre les Dominicains. En effet, depuis le départ des Haïtiens, les commerçants sont en faillite à Pédernales, éprouvant toutes les difficultés à écouler leurs produits. Et depuis, le maire Matos ne sait plus où donner de la tête pour obtenir la réouverture du marché. L’invitation à la reprise des activités vendredi dernier a été ignorée par la communauté haïtienne, à l’initiative du maire Harry Bruno qui, avec le support de policiers haïtiens, a pu persuader ses compatriotes d’Anse-à-Pitres, de ne pas traverser la frontière. Connaissant l’incompétence de nos autorités, les commerçants pourraient décider seuls, de traverser la frontière pour participer au marché binational, en dépit des consignes des autorités haïtiennes.
Altidor Jean Hervé