Au moins 160 présumés bandits ont été tués, depuis le lancement de «Bwa Kale», selon le Centre
d’Analyse et de Recherche en Droits de l’Homme (CARDH). Dans un rapport publié le vendredi
26 mai, le Centre d’Analyse et de Recherche en Droits de l’Homme ( CARDH ) affirme que
depuis le lancement du mouvement «Bwa Kale» le 24 avril dernier, au moins 160 présumés
bandits ont été pourchassés, lynchés et brûlés vifs sur l’ensemble du territoire national.
Si le mouvement a gagné le pays tout entier, la majorité des cas ont été recensés dans le
département de l’Ouest, avec 134 présumés bandits tués, soit 83,75%. Neuf cas ont été recensés
dans le département de l’Artibonite, cinq dans le Centre, neuf dans la Grand-Anse. Avant ce
mouvement, moins de 78 avaient été exécutés à Turnel, Rozo, Miragoâne, Solino/Delmas 24,
selon le CARDH.
Le CARDH souligne en outre que le mouvement «Bwa Kale» a conduit à une réduction
drastique des enlèvements, du 24 avril au 24 mai 2023. «Sans porter un jugement de valeurs, en
un mois, le mouvement «Bwa kale» apporte des résultats probants et visibles. La peur a changé
de camp ! Le kidnapping et les tueries causés par les gangs ont drastiquement diminué. Les
assassinats ont connu une baisse respective de 70,55% et 50,58 %. Presque pas d’enlèvements»,
argumente le CARDH dans ce rapport.
Par ailleurs, pour expliquer les causes de cette réaction populaire, le CARDH avance que
le mouvement «Bwa Kale» est une réponse à la cruauté extrême des gangs. «Car les forces de
l’ordre sont impuissantes, l’État est incapable d’user de son monopole de (la) violence légitime,
et l’international «tourne en rond» et s’enlise dans la rhétorique des promesses», explique-t-il.
Le CARDH prône l’encadrement du mouvement «Bwa Kale»
Dans son analyse, le CARDH propose que le mouvement «Bwa Kale» soit encadré pour une
sécurité durable. «Il est absolument nécessaire que les autorités centrales et locales, les
notables, les intellectuels, les politiques et les organisations de la société civile se mettent
ensemble pour encadrer le mouvement, en vue d’éradiquer la gangstérisation et le kidnapping
du territoire», recommande le CARDH.
L’organisation avertit que les représailles des gangs seront pires que les atrocités
précédant le «Bwa Kale». À titre indicatif, l’organisation évoque le massacre orchestré par le
gang 5 Secondes, à Sources Matelas, le 19 avril 2023, au cours duquel une quarantaine
d’assassinats et de disparus ont été enregistrés. Ce massacre, selon le CARDH, a été une
revanche contre la brigade citoyenne, mise en place à la suite de l’attaque du 29 novembre 2022
(au moins 12 assassinats).
Aussi, pour le CARDH, le mariage automatique police-population doit être consolidé ;
des moyens concrets doivent être mis à la disposition de la Police nationale et des forces armées.
De nouvelles dispositions locales contraignantes (arrêté municipal) doivent également être
adoptées, publiées et suivies. L’organisation juge aussi qu’il faut prendre des mesures
institutionnelles pour s’attaquer aux «maîtres» de la criminalité. «Ces gangs visiblement connus
(Izo, Ti Lapli, Lanmò 100 jou…) ne sont pas les vrais «maîtres» de la criminalité en Haïti. C’est
une nouvelle organisation stratégique qui utilise les gens et les quartiers vulnérables comme bras
opérationnels. Des procès exemplaires doivent être réalisés pour donner le ton. Des prisons
modernes doivent être construites, la police doit être épurée et renforcée, la vie politique
haïtienne doit être moralisée», écrit le CARDH.
Cette structure dirigée par Gédéon Jean, préconise également que des études
criminologiques soient menées pour une compréhension de ces nouveaux comportements et
prévenir leurs impacts sur l’avenir.
Emmanuel Saintus