Comme consolation, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a adopté de façon unanime la résolution 2653 qui prévoit une série de sanctions contre Haïti. Ces sanctions incluent un embargo sur l’exportation des armes vers Haïti, des interdictions de voyages, le gel des avoirs des individus et entités désignés par ces mesures qui seraient les auteurs ou complices des actions qui entravent la paix, la sécurité et la stabilité d’Haïti.
Un comité onusien va s’occuper de dresser la liste (blacklist) des individus et entités qui seront visés par ces sanctions. C’est un déjà-vu pour des sanctions onusiennes qui avaient appauvri le peuple haïtien entre 1992 et 1995. Le représentant d’Haïti au Conseil de Sécurité ne s’est pas montré convaincu des résultats de ces mesures restrictives contre le peuple haïtien, en rappelant que les sanctions seules ne peuvent pas résoudre les violences en Haïti et qu’il renouvelle sa demande au Conseil d’apporter un soutien réel, sous la forme d’une force spécialisée, à la Police Nationale d’Haïti. Il a indiqué que le pays est dans une course contre la montre, avec les victimes des violences qui se multiplient au quotidien. Malheureusement, nous devons attendre 13 mois pour confirmer l’efficacité de ces sanctions.
Contexte des sanctions
Haïti fait face à des pénuries de carburant et de gaz, cela fait plus de trois ans. Avec nos gallons jaunes, nous parcourons les rues sales de nos grandes villes, juste pour trouver une station à essence en service et y passer des heures, rien que pour quelques litres d’essence. Aujourd’hui, le problème de carburant est devenu sérieux, parce que la distribution ne peut pas se faire à cause des menaces d’un chef de gang, selon le gouvernement haïtien. Pendant plus de 14 mois au pouvoir, ce cancer rongeait le peuple, mais on n’avait aucune urgence de l’éradiquer. Une fois que ça touche les riches importateurs de riz, une fois que les tanks des blindés des ambassades sont à sec, nous sollicitons des troupes étrangères comme protection ?
Certes, il faut résoudre la crise haïtienne, mais cela doit se faire par le peuple haïtien et au profit du peuple haïtien. Aussi réelles que certaines menaces puissent sembler, le gouvernement n’a fait aucun effort convaincant pour assurer la distribution du carburant, dans tous les coins du pays pendant plus d’une année. En fait, comment pouvons-nous être sûrs qu’il y a du carburant, dans le terminal de Varreux ? Si le gouvernement ne peut pas garantir la distribution du carburant du terminal de Varreux, le peuple doit chercher une autre possibilité pour s’approvisionner lui-même. Et, qui sait ? Le chef du G9 pourrait même aider la population dans ce sens, car c’est grâce à lui qu’on parle d’Haïti au Conseil de Sécurité, n’est-ce pas ?
Gel des avoirs
Si un citoyen a commis des crimes de droit commun, il faut mettre la justice et les forces de sécurité en action contre la personne en question. Dans le cas du patron de G9, si la justice haïtienne a des évidences des exactions, est-ce aux étrangers de le sanctionner ? Comment expliquer que, jusqu’à date, aucune sanction n’ait été prononcée contre lui par les autorités en place ? On oublie trop vite les propos élogieux des cadres de la BINUH, selon lesquels, le taux de crimes mortels aurait baissé, grâce au syndicat des gangs de G9. Il n’y a aucune provision légale, aucun décret, aucune ordonnance d’un juge pour la saisie des biens des membres du G9.
Sur quelle base légale, les néo-colons peuvent-ils bloquer les comptes des citoyens ? La constitution haïtienne ne permet pas ce genre d’exactions à nos citoyens, sans passer par les voies légales. Comment un premier ministre de facto peut-il se permettre de faire de l’ONU un tribunal pour condamner ses concitoyens, sans aucun jugement ? N’est-ce pas donner aux étrangers Carte Blanche pour accuser tous leurs opposants politiques et les neutraliser, une fois pour toutes ? On comprend pourquoi aujourd’hui, dans les réseaux sociaux, on partage des mémos qui annoncent l’éventuel blocage du compte moncash du porte-parole du G9, juste pour ridiculiser ces sanctions financières, pour l’instant, contre un seul citoyen haïtien qui probablement n’a aucun compte bancaire ni à l’étranger ni en Haïti. D’ailleurs, ce même individu, depuis plus d’un an, est sanctionné par la justice américaine pour sa participation présumée dans le massacre de La Saline.
Interdiction de voyager
Le peuple haïtien sait bien que la vraie interdiction de voyager est longtemps entrée en vigueur. D’abord, par les ambassades des pays soi-disant amis d’Haïti dont leurs consulats traitent les demandeurs de visas comme persona non grata. Pour la moindre turbulence, tous les rendez-vous sont annulés, les sommes astronomiques versées par nos compatriotes ne sont jamais remboursées. Le Mexique, lui-même, qui se fait passer pour un sympathisant de la cause haïtienne, devrait passer en revue sa politique consulaire vis-à-vis d’Haïti. Comment expliquer que leur ambassade en Ukraine soit encore ouverte quand celle en Haïti est fermée ?
Au jour le jour, il y a des interdictions de voyage, encore plus cruelles et criminelles, imposées par les organisations terroristes locales. Cela fait déjà presque deux ans, depuis que les Haïtiens ne peuvent voyager librement dans leur propre pays. La route nationale numéro 2, dans la zone de Martissant, est convertie en route de la mort. Plus de 4 départements sont négativement affectés par ces restrictions. Pour un citoyen qui vit à Carrefour, rendre visite à ses amis, ses parents, au centre-ville de Port-au-Prince devient une galère. Le premier ministre lui-même fut interdit de présenter un hommage au Père de la Patrie, sa Majesté l’Empereur Jacques Premier, au Pont-Rouge. Aux Gonaïves, quand le PM a tenté de violer son interdiction de voyager dans cette ville, il a failli laisser sa peau dans la Cité de l’Indépendance. Et, plus récemment, le lock ou lock down que connaît tout le pays où la circulation est interdite aux paisibles citoyens, n’est-ce pas un autre exemple qui illustre bien des sanctions discriminatoires imposées par des organisations politiques et criminelles qui gangrènent le pays ?
Alors, comment devons-nous réagir quand l’Organisation des Nations Unies nous parle de sanctions, avec une interdiction de voyager contre un seul citoyen haïtien, pendant que tout le peuple ne peut pas s’aventurer dans les rues, depuis plus de trois semaines ? Comment comprendre que cette interdiction va nous aider à traverser Martissant, Canaan, Fonds-Parisien, Cité-Soleil, Route 9, Bel-Air, Laboule 12, Thomassin, Route Plaine, Route Frère, etc., sans nous faire tirer dessus, sans nous transformer en victimes des terroristes ? Il faut demander au premier ministre, si, avec ces sanctions, les bandits vont lever son interdiction de voyage dans le pays. Est-ce qu’il pourra se rendre à Martissant et donner la garantie aux milliers de familles, qui avaient laissé leur maison, d’y retourner paisiblement?