Certaines villes du pays ont connu plusieurs jours de mobilisation, d’autres étaient encore en ébullition, le mardi 23 août 2022, tandis que d’autres étaient relativement calmes. Aux Cayes, les rues étaient désertes. Toutefois, à Petit-Goâve et aux Gonaïves, les manifestants ont continué à crier leur colère contre la cherté de la vie, la pénurie de carburant et la dépréciation de la gourde. Les activités économiques étaient paralysées, en raison notamment de la fermeture des institutions publiques et privées.
Depuis plusieurs jours, de nombreuses communes du département du Sud sont bloquées. Des membres de la population érigent des barricades pour protester contre la vie chère, l’insécurité et la pénurie de carburant. Très peu remarqué sur le macadam, lors des manifestations, le commissaire du gouvernement des Cayes, Ronald Richemond, demande une trêve. En conférence de presse, le vendredi 26 août 2022, le chef du parquet des Cayes a voulu assurer à la population qu’il n’entend pas l’empêcher de manifester, tout en rappelant que le droit de manifester est garanti par la Constitution haïtienne du 29 mars amendée.
Selon lui, il faut une trêve pour que la population puisse se ravitailler pendant le weekend. Il en faut aussi pour donner du temps à l’État d’apporter des réponses aux revendications des protestataires et pour permettre à la police et à la justice de pouvoir traquer les bandits qui sont venus dans la ville pour faire du désordre. En effet, le chef du parquet a informé que, tandis que la population fait passer ses revendications, des membres de gangs de Martissant, de 400 Mawozo et du groupe dirigé par Krisla sont entrés dans la ville pour semer la pagaille. Certains d’entre eux sont recherchés par la police dans le département, depuis le phénomène «peyi lòk» de 2019. Ils ont pillé, mardi dernier, la Caritas des Cayes, des conteneurs et des magasins dans le centre-ville des Cayes, selon les propos du commissaire du gouvernement.
Des membres du secteur patronal haïtien se sont dit préoccupés par la détérioration sans précédent de la situation socio-économique et des conditions de vie de l’immense majorité des citoyens. «Nous sommes interpellés par notre devoir patriotique de rappeler, aux protagonistes économiques et politiques de notre pays, leurs impérieuses obligations de privilégier l’intérêt national et de mettre fin à leurs tergiversations, a écrit ses hommes et femmes du secteur patronal.»
«Nous devons tous être conscients que la faillite actuelle est collective et que le redressement passe par un engagement de tous. Notre premier appel en ce sens sera vers les femmes et hommes d’affaires de notre pays, relativement au respect scrupuleux de leurs responsabilités fiscales et légales, de l’observance de saines pratiques commerciales, de transparence et de concurrence loyale et à l’abandon de comportements malsains, préjudiciables à la collectivité.» C’est ce qu’ont écrit les signataires de la note.
«Les soussignés se doivent également de lancer un appel patriotique et pressant aux protagonistes politiques, afin de se transcender en consentant, chacun et chacune, les sacrifices qui s’imposent pour se mettre d’accord sur une solution équitable et transparente, à l’impasse politique actuelle.
L’heure est grave et exige que les acteurs cessent de remettre sur le tapis des questions qui provoquent les mêmes désaccords et aboutissent aux mêmes échecs. Aucune des parties en conflit n’a la légalité ni la légitimité requise pour faire prévaloir sa thèse. Le pays ne peut plus être pris en otage par des intérêts politiques partisans. Il incombe donc à la classe politique de trouver un consensus autour de deux thèmes fondamentaux», a poursuivi la note.
Altidor Jean Hervé