De l’aube au crépuscule,
Ils ont peur ;
Peur de l’enfant né sans papa,
Au père « anfouraye »
Dans le labyrinthe
De nos mœurs exceptionnelles,
Pleurant sa faim,
Demandant à manger à sa maman
Qui lui répond qu’elle a faim, elle aussi,
Et lui demande d’aller crier
Son malheur
À son papa ;
Ils sont irrités
Par la voix limpide
De la marchande ambulante
Sous le soleil brûlant,
Chantant le refrain
De ses marchandises,
De porte en porte,
Comme pour donner encore plus d’énergie
À ses jambes infatigables
Et continuer à se mouvoir,
Sous le poids de son faix ;
L’étudiant, portant en lui
Le poids de son peuple
Et la lampe de l’espoir,
Sonnant le lambi
Du rassemblement
Pour la justice sociale,
Fait peur, lui aussi ;
Le gazouillis des oiseaux dans les bois,
Chantant à l’unisson,
Comme un cri de révolte
Contre les arbres de la forêt
Qu’on décapite,
Semble mettre les rivières et les mers
En ébullition ;
Là-bas, le chant capricieux des crapauds
Dans la nuit, autrement silencieuse,
Met un grand nombre de lions aux aguets ;
L’âne qui, par pure coïncidence,
Brait de loin,
À la vue des bergers
Sans même savoir
Ce qui se passe autour de lui,
Suffit pour leur faire prendre
La poudre d’escampette…
Tant de choses sèment la confusion
Et font trembler les mitraillettes,
Des poches de leurs maîtres
Qui, dorénavant, déversent des rafales
Assassinant l’atmosphère,
Traitant les humains
Comme des gibiers égarés.
Ah ! le verbe a toujours fait frémir ;
Et on a menotté la parole,
Devenue prisonnière
Dans les murs de la pensée
De son auteur,
Pris en otage.
Dans leur désespoir,
Ces bergers ont perdu
Le dernier brin de raison
Et tiennent la bride
À leurs ouailles
Mises en abattoir.
Oh ! ils ont pris la liberté
À la gorge !
Or, ces fidèles
Résilients,
À l’histoire épique,
Finiront toujours par se réveiller
Victorieux !
Egbert Personnat 16 décembre 2020