Le Fonds des Nations-Unies pour l’Enfance (UNICEF), par le biais de sa branche en Haïti, a dénoncé les cas d’exploitation sexuelle sur des mineures dans le département de l’Artibonite. Cette condamnation fait suite aux informations rapportées dans la presse haïtienne et faisant état des cas de plusieurs filles qui seraient âgées de moins de 18 ans, données en concubinage à des hommes plus âgés, moyennant des sommes d’argent. Cette forme d’échange «économico-sexuel», ponctuel est explicite et préalablement négociée par les habitants de la zone. Selon les témoignages recueillis, certains parents offrent leurs filles et fillettes à des hommes, lors d’échanges, à des taux d’intérêt variables. À la base de cet exercice, deux motifs : d’abord l’idée de perpétuer une tradition régionale, ensuite l’ambition de tirer un bénéfice sur la sexualité de leurs enfants, pour pouvoir faire face à des difficultés économiques cuisantes. Dans cette localité, presque tous les enfants de sexe féminin, ayant à peu près 14 ans et plus, sont exposés à une spirale de concubinage conditionné, conformément aux demandes faites par les demandeurs : les hommes. D’après les résidents de ce milieu, il existe une procédure « spéciale » où l’éventuel intéressé peut procéder à la réservation d’une adolescente. De ce fait, presque toutes les fillettes de 7 à 8 ans se trouvent déjà sous l’emprise des demandeurs qui viendront les récupérer, à partir du moment où elles sont «prêtes» (14 à 16 ans)…. « Cette pratique existe depuis fort longtemps dans la localité », témoigne Pierre Wistin qui avoisine aujourd’hui la soixantaine. L’homme se rappelle, qu’à son enfance, les échanges tournaient autour de montants allant de mille cinq cents (1 500) gourdes à deux mille (2 000) gourdes, mais impliquaient uniquement des adultes, autour d’une tradition assimilée à un régime dotal. « Mais en impliquant des mineures, la pratique devient carrément obscène », soutient-il. Informé de cette réalité, le Protecteur du Citoyen et de la Citoyenne, Renan Hédouville, souligne que « ces pratiques sont dégradantes et enlèvent toute notion de dignité humaine aux victimes ». Le numéro 1 de l’Office de Protection Civile (OPC) dit regretter, qu’après les 215 ans d’indépendance d’Haïti, le pays connaisse encore ces types de pratiques qui rappellent la traite négrière et l’esclavage, alors qu’Haïti a été le premier (pays) à mettre fin à la traite des personnes sur le continent américain. Analysant la situation, Ely Thélot, ex-président du Comité National de la Lutte Contre la Traite des Personnes (CNLTP), se dit perplexe. D’après Thélot, le défi le plus complexe, dans de tels cas, survient lorsque les victimes ne se sentent pas victimes ou du moins l’ignorent, et que les trafiquants (acheteurs) ne se sentent pas concernés par les prescrits de la loi. Bien qu’Haïti dispose de plusieurs lois de protection des mineurs et d’une loi contre la traite de personne (loi du 2 juin 2004), cette dernière demeure encore trop peu connue et, encore moins, appliquée… Cette loi dans son article 1.1.1 décrit ce qu’est la « Traite de personne » comme étant « le recrutement, le transport, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, par la fraude, la tromperie, par abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre, à des fins d’exploitation.» Haïti possède les outils juridiques pour protéger les mineurs et combattre la traite des personnes, rappelle le Sénateur Jean Renel Sénatus qui affirme que, dans le nouveau Code Pénal, il y aura beaucoup plus de mesures qui permettront de sévir avec rigueur contre toute personne impliquée dans des cas de traites de personnes.
Par ailleurs, la Police nationale d’Haïti a fait état de 17 cas de viols sur mineures, dont 3 viols collectifs, du 1er mai au 11 juillet 2019. Il y a eu deux cas de complicité de viols sur mineures, a ajouté la PNH, lors d’une conférence de presse, le jeudi 11 juillet 2019.
Altidor Jean Hervé