Le samedi 18 août, au poste frontalier de Carrizal (Elías Piña), un violent incident a éclaté entre des civils haïtiens et des militaires dominicains. L’incident est survenu alors que trois (3) camions de ciment destinés à Haïti ont été arrêtés par les douaniers dominicains pour un contrôle de régularité. Les chauffeurs dominicains qui étaient disposés à payer les droits de douanes dominicains ont été empêchés de le faire par les chauffeurs haïtiens qui se sont mêlés d’une affaire strictement dominicaine, selon la mairie de Belladère. Les douaniers dominicains ont demandé aux membres du Corps spécialisé de sécurité frontalière terrestre (CESFRONT) d’immobiliser les véhicules et d’interpeller les conducteurs et les intervenants haïtiens pour mettre un terme à l’altercation. « Quelques minutes plus tard, une foule de ressortissants haïtiens, armés de machettes et de bâtons a essayé de déplacer en vain les camions par la force, se heurtant à la résistance des soldats venus en renfort, sur lesquels ils ont lancé des pierres et divers autres objets. C’est lors de cet affrontement que plusieurs coups de feu provenant d’Haïtiens non identifiés ont été tirés vers les dominicains, provoquant en retour une réaction des militaires dominicains qui ont ouvert le feu pour mettre fin à ce début de fusillade et de soulèvement populaire. À entendre les Dominicains, le bilan serait de trois (3) blessés légers chez les Haïtiens et un (1) blessé chez les Dominicains. La version haïtienne fait état de six (6) blessés Haïtiens, touchés par balles et conduits au Centre hospitalier de Mirebalais. L’un des blessés est déjà retourné chez lui, quatre (4) autres ont été touchés au bras ou aux jambes et un a reçu une balle au thorax. À en croire Jean Marie Reynaldo Brunet, le ministre démissionnaire de l’Intérieur, « les pronostics vitaux de ces personnes ne sont pas engagés. » En réaction à cet incident, Jovenel Moïse a déclaré sur son compte Twitter : « Je déplore les incidents survenus sur la frontière à Belladère, suite à une violation territoriale, au cours desquels des compatriotes ont été blessés. Les autorités sont instruites de prendre les mesures appropriées pour le respect de l’intégrité territoriale de la République d’Haïti. » Cette déclaration a provoqué une vive réaction officielle des ministres dominicains de la Défense et des Affaire Étrangères. Le ministre de la Défense, Paulino, a qualifié d’inappropriées, les déclarations du Président d’Haïti et nié catégoriquement que des soldats dominicains avaient violé le territoire haïtien, rappelant que l’incident s’était produit au poste frontalier de Carrizal, plus précisément dans la zone neutre appelée « La chaîne », où la circulation des véhicules et des marchandises n’est pas autorisée pour passer sur le territoire haïtien, et non en Haïti, comme l’affirme le Président d’Haïti. Indiquant qu’il n’y a eu aucune ingérence, les Dominicains n’ayant fait que répondre à une agression haïtienne armée dans cette zone, le ministre dominicain conclut : « nous n’autoriserons aucune action menaçant la sécurité et la défense de notre Nation, ni les violations des réglementations fiscales et migratoires. » Pour sa part, le Chancelier Miguel Vargas Maldonado, a déclaré qu’il avait convoqué une réunion des autorités diplomatiques d’Haïti pour discuter de la situation. Le dimanche 19 août 2018, en Haïti, après le message du Chef de l’État qualifiant l’incident de « violation territoriale », le Premier ministre démissionnaire, Jack Guy Lafontant, a convoqué Michel-Ange Gédéon, Directeur Général de la Police Nationale d’Haïti (PNH), pour en savoir plus sur ce début de nouvelle crise avec le pays voisin. Par la suite, sur instruction du Président Jovenel Moïse, une importante délégation présidée par Lafontant s’est rendue à Belladère, pour s’enquérir sur place de la situation et discuter du problème frontalier. À cette réunion de haut niveau étaient présents les ministres démissionnaires Jean Roudy Aly (Justice), Jean-Marie Reynaldo Brunet (Intérieur), Antonio Rodrigue (Affaires Étrangères), le secrétaire général du Conseil des Ministres, Renald Lubérice, Michel-Ange Gédéon, le DG de la PNH, l’Inspecteur général en Chef de la PNH, Ralph Stanley Jean Brice, le responsable de la Direction Centrale de la Police Administrative, Carl Henry Boucher.
Emmanuel Saintus