La situation des déplacés dans la ville frontalière d’Anse-à-Pitres se stabilise, informent les autorités locales. Plus d’un millier de ressortissants haïtiens résidant à Pedernales ont fui cette ville, au cours des derniers jours, en raison des menaces de représailles. La tension est toujours perceptible dans la région frontalière où les déplacés étaient sur le qui-vive. Au cours des deux dernières semaines, les Haïtiens ont trouvé refuge dans la ville d’Anse-à-Pitres où ils sont pris en charge par la mairie et le gouvernement haïtien. Les autorités gouvernementales ont indiqué que des discussions diplomatiques ont lieu, afin d’empêcher toute escalade. Le maire d’Anse-à-Pitres, Harry Bruno, souligne que des Haïtiens continuent d’affluer vers sa commune. Toutefois, le nombre a diminué comparativement à la semaine écoulée. Il s’agit de compatriotes qui avaient trouvé une cachette et qui ont pu fuir, a-t-il laissé entendre. Les Haïtiens redoutent de nouvelles violences des Dominicains pendant la période des dernières prières pour les victimes, insiste-t-il. Les actes de violences répétées à l’encontre des migrants haïtiens au niveau notamment des zones frontalières seraient dus à l’irresponsabilité de l’État haïtien, déplore le maire d’Anse-à-Pitres, Harry Bruno. Il y a une absence d’infrastructures à Anse-à-Pitres (Haïti), et les services d’accès aux soins de santé, à l’électricité et à l’eau ne sont pas disponibles, contrairement à Pedernales, commune de la République Dominicaine voisine. Il n’existe même pas un marché communal à Anse-à-Pitres, déplore Bruno. La construction d’un marché communal pourrait permettre, dit-il, d’effectuer, grâce au prélèvement de taxes sur les marchandes et marchands, des entrées financières profitables à la commune. Un seul commissariat abritant 6 policiers nationaux, très mal équipé, dessert des dizaines de milliers d’habitantes et d’habitants dans la commune, fait-il remarquer. Les Haïtiens se rendent régulièrement en République Dominicaine pour avoir accès à des services qui, malheureusement, leur font défaut sur le territoire haïtien, regrette-t-il. Les Dominicaines et Dominicains ne nous respecteront jamais si nous continuons à être dépendants d’eux, croit le maire d’Anse-à-Pitres qui exprime sa déception face à la situation actuelle. Bruno exhorte le pouvoir central à rendre disponibles des fonds communaux au profit du développement des zones frontalières et côtières du pays.
La Commission de concertation haïtiano-dominicaine (CCHD) appelle les États haïtien et dominicain à prendre les dispositions nécessaires, pour garantir l’harmonie entre les deux peuples qui se partagent l’île d’Haïti, dans une note en date du vendredi 16 mars 2018. Cet appel est lancé en relation à la situation de violences, enregistrée, depuis le lundi 12 mars 2018, à Pedernales (République Dominicaine), ville frontalière avec Anse-à-Pitres (Sud-Est d’Haïti). Il est d’une importance vitale que l’État dominicain renforce son cadre législatif contre les actes de haine, en approuvant, notamment, l’avant-projet de loi générale sur l’égalité et la non-discrimination, précise la CCHD. Elle souhaite la collaboration des autorités des deux pays, afin de rendre justice aux victimes d’actes de représailles, perpétrées par des Dominicains sur des migrantes et migrants haïtiens. Elle invite également les médias, citoyennes et citoyens des deux pays à éviter des reproches généralisés et à attendre le verdict de la justice, dans l’objectif de contribuer au rétablissement de la paix à Pedernales. Beaucoup d’Haïtiennes et d’Haïtiens y ont été pourchassés par des Dominicains qui les accuse d’être responsables de l’assassinat d’un couple dominicain, l’agriculteur Reyes Pérez et son épouse Neida Féliz Urbáez. Alors que plusieurs ressortissants haïtiens ont fait l’objet d’actes de violence à Pedernales, le porte-parole de la PNH dédouane la responsabilité de la POLIFRONT dans la prévention de ces actes barbares. « La POLIFRONT n’est pas sur la frontière pour gérer ce genre de conflit », dit-il, tout cru, après une question d’une journaliste sur l’utilité de la police frontalière par rapport à ces conflits. Frantz Lerebours s’est empressé de souligner que la POLIFRONT était une police de support, de défense des intérêts du pays d’une manière ou d’une autre. Il continue pour dire qu’à un certain niveau, c’est l’armée qui s’occupe des frontières. « Ces derniers suivent une formation spécifique en matière de sécurisation des frontières. Ils doivent supporter les agents douaniers, les trafics illicites sur la frontière », rappelle le porte-parole de la PNH. Le porte-parole poursuit en croyant que le fait qu’on n’a pas une armée opérationnelle, il est très difficile de rentrer dans une dynamique frontale. « On ne peut (pas) gonfler les muscles pour réagir », dit-il.
Emmanuel Saintus