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Mes cris du cœur

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Si j’ose paraphraser cette fameuse pensée de Frédérick Nietzche, je dirais moi-même que : « le verdict de l’avenir est le verdict de ce même oracle que nous comprendrons, si nous nous engageons à être les vrais architectes et artisans du présent, les connaisseurs du passé.»  Ce grand philosophe, d’ailleurs l’un de mes auteurs de prédilection, est parvenu à transcender le temps, l’espace et, bien sûr, sa nationalité allemande, par la grandeur, la rectitude et la pertinence de ses réflexions .  Je crois, qu’à tous les points de vue, ces pensées s’appliquent à la triste et dure réalité de notre chère Ayiti, que nous, concitoyens de cette terre si singulière et extraordinaire, nous refusons de nous engager à prendre toutes les mesures nécessaires, même au prix de grands sacrifices, pour mettre fin à cette situation dont l’insoutenabilité a été déjà trop longtemps démontrée.

Comme disait le Pape Jean Paul II, lors de sa visite en Ayiti, comme pour augurer la fin d’un système ayant parvenu au paroxysme de ses exactions et de ses oppressions : «  Il faut que quelque chose change …»  Les enjeux qui en découlent sont, dans les circonstances actuelles, de grandes tailles.  En effet, nous ne sommes plus en mesure de nous procurer le strict minimum nécessaire, même pas la garantie de la vie, voire même la dignité humaine.  Plus que jamais, la famille, unité de base de toute société, chez nous, est réduite à sa plus simple expression : une institution composée du père, de la mère et des enfants, sans personne d’autre, et où les valeurs sacro-saintes et cardinales de la nation se diluent dans l’acharnement vers la quête de la satisfaction personnelle et/ou de la réalisation de soi, au détriment des canons d’éthique familiale.  Dieu seul sait de quelle réalisation il s’agit, dans un pays où tout est hypothéqué, trafiqué, intoxiqué, falsifié et dévalué !

 

Il nous faudrait tout simplement être insensés pour ne convenir qu’il ne sert à absolument rien d’avoir une grande somme de connaissances, quand autour de nous règne l’ignorance, de faire étalage de toutes les richesses et des fortunes, quand notre entourage patauge et végète dans la misère et la pauvreté les plus poignantes.  En effet, on pourrait continuer à se poser autant de questions auxquelles nos soi-disant élites intellectuelles et bourgeoises ne seraient pas à même de répondre, vu la « profondeur » de leur désintéressement et de leur nonchalance vis-à-vis de la cause nationale. Sous nos yeux, nos jeunes partent vers des rives inhospitalières, en quête d’un mieux-être.  Ayant finalement compris qu’en la république voisine, ils ne sont point les bienvenus, ils ont mis le cap sur le Salvador, l’Équateur, en vue d’atteindre le Brésil, avant de se précipiter fiévreusement vers le Chili avant que ne se ferment devant eux, les portes de ce nouvel Eldorado.

 

Dans la situation chaotique dans laquelle est plongé le pays, laquelle situation qui ne fait point honneur à ces gestes si extraordinaires que nous ont léguées nos ancêtres, il faudrait nous indigner, du moins ceux-là à qui il en reste encore la capacité.  Personnellement, je comprends très mal qu’on veuille à tout prix investir la plus haute magistrature du pays ou n’importe quel autre poste électif ou nominatif, si ce n’est sur la base de mérite, en raison d’un nationalisme, d’un patriotisme et dans l’esprit, non pas de se servir, ou d’être servi, ou encore d’asservir, mais plutôt de servir la noblesse d’une cause aussi honorable que celle de la défense des plus hauts intérêts de la Nation.  Je crois qu’un bon bain de réflexions positives, visionnaires et révolutionnaires, tel est notre besoin en cette heure si lugubre et fatidique de notre histoire. Je n’entends plus faire partie de ces optimistes tristes ni non plus de la bande des pessimistes audacieux simulant la gaieté. Je suis de ceux qui croient encore au changement, si nous mobilisons et unissons toutes nos ressources pour agir en symbiose, comme sous l’emprise de cet esprit de synergie qui nous avait traversés pour faire 1804.  L’âme de ce peuple zombifié, dans le silence de ses frustrations et de ses humiliations, crie pour le changement, à défaut de révolution.  Non pas celui qu’on nous promet, pour nous amadouer comme une bande de va-nu-pieds naïfs, tous les cinq (5) ans et auquel on ne croit même pas soi-même, mais celui du chambardement réel et total du statu quo, en vue d’un nouveau et vrai départ sur de bons pieds.  Pour ce faire, il convient de combiner toutes nos énergies, toutes nos ressources humaines, matérielles, culturelles et spirituelles, nos compétences et expériences dans tous les domaines, tant d’ici que d’ailleurs, comme Bouckman en a eu le discernement à Bois-Caïman.

 

Refusons de nous lamenter et de pleurnicher, et ce, catégoriquement.  À tout bout de champ, cessons de complaindre envers et contre tout, quant à la descente aux enfers, en apparence irrémédiable, et aux fourberies dans lesquelles s’entremêle le destin de notre pays.  Faisons preuve de probité, d’intelligence, de discipline, de bonne gestion et de gouvernance, toujours, en tout et partout, du plus petit au plus haut fonctionnaire.  Ayons du caractère ! Que nos compromis ne s’assimilent point à des compromissions et ne servent à plus aucun autre intérêt que celui de la nation.  Résolvons-nous de nous adonner scrupuleusement à l’acte, combien complexe, de réfléchir soigneusement et avec cohérence, afin d’agir le mieux possible sur nos réalités pour les transformer.  Donnons-nous pour devoir de nous soumettre à la saine contagion, dont la propagation ne peut être qu’avec une intensité supérieure ou égale à celle de la ruée vers la dégringolade et la dérive auxquelles le pays est livré depuis tantôt.  Il nous faut désormais être à même d’enterrer, pour de vrai, la hache de la discorde qui pollue notre atmosphère d’unité en tant que peuple qui se cherche encore dans le spectre de notre vivre-ensemble particulier où l’immoralité, l’indécence, la cupidité, la corruption, la malversation et la prostitution battent leur plein et ne se mesurent qu’à l’effondrement de l’État. Ayons pour conviction, de travailler ensemble à la grandeur et à la prospérité de la patrie commune, comme l’ont fait en leur temps nos ancêtres, au prix de notre sang et de nos sueurs, en vue de léguer à nos enfants et petits-enfants, un pays où il fait bon vivre… Et le seul endroit où l’Ayitien se sait véritablement libre, c’est Ayiti.

 

Ce n’est certes pas sans raison que nos aïeux se sont rendus à l’évidence que ni les mulâtres ni les noirs, de manière séparée, aucune de ces classes sociales n’avait la possibilité de conduire le pays vers les prouesses de 1804.  Et, dans la nouvelle Bataille de Vertières que nous devrons livrer aujourd’hui, peut-être, non pas par les armes, mais par l’intelligence, tout le secret se trouve dans la stratégie, la méthode, les principes, la discipline, la probité, la justice sociale avec lesquelles nous sauront organiser l’économie de la connaissance, l’entreprenariat social, l’engagement et la participation citoyens.  En un mot, tout se résume au bon sens avec lequel nous choisirons nos leaders qui sauront mettre en œuvre un plan pour réaliser les objectifs prioritaires de notre société pour l’extirper de sa torpeur et de sa gangue de médiocrité.   Dorénavant, comme par un miracle divin, imposons-nous le devoir de rupture avec nos postures de chialeurs impénitents.  Agissons, avec pertinence et cessons de nous plaindre pour assumer nos responsabilités personnelles.  Dans nos sphères de compétence, et ce, à l’intérieur de nos moyens, tâchons de poser des actions qui vaillent la peine et qui fassent tache d’huile, en tout temps, partout et en toutes circonstances.

 

Pour conclure, il me plait à  signaler dans la liste de l’œuvre complète de Fréderic Engels et de Karl Marx, une correspondance dans laquelle s’exprimaient les grandes inquiétudes mutuelles des deux camarades. Dans cette lettre adressée à Engels, Marx fait part de ses frustrations par rapport à la situation de misère et de déshonneur, au cours des années 40 du 19e siècle, dans laquelle vivait le peuple allemand.  À ce moment notre chère patrie était naissante, à peine on pouvait se tenir en tout équilibre pour apprendre à marcher. Tandis que le contexte géopolitique international n’était pas en notre faveur, nous avions su tenir bon, grandir pour finalement aller de l’avant.  Il nous faut, coûte que coûte, renouer avec notre passé en vue de ces prouesses pour pouvoir les répliquer dans le contexte d’aujourd’hui qui, d’une certaine manière, ressemble à celui d’alors.  Il ne faut pas avoir peur de le dire: encore une fois, nous sommes victimes de notre histoire, avec bien entendu la complicité des mercenaires nationaux.  Eduardo Galeano, le grand écrivain uruguayen, de son vivant, ne s’était jamais lassé de le dire et de le répéter dans plusieurs de ses écrits, (Les veines ouvertes de l’Amérique, Haïti : la malédiction blanche, et d’autres chroniques anti-impérialistes) en raison de sa fascination pour la seule et vraie démarche d’émancipation des peuples, à savoir, la Révolution Haïtienne. On ne nous a jamais pardonné cet acte si grandiose, la mise en déroute de la plus puissante armée de l’époque, celle Napoléon.   Notre pays a été et continue d’être victime de son histoire ainsi que d’une hypocrisie maquillée sous la forme d’une coopération et d’aides internationales pour, encore une fois, être pillé de toutes ses richesses, de ses mines par des corsaires, des ravisseurs, des pirates modernes, tant de l’intérieur que de l’extérieur.  Nos mines d’or ainsi qu’éventuellement l’existence de gisements de pétroles qui pourraient amorcer la relance de l’économie et de la production nationales et la mise en marche d’une vraie communauté scientifique haïtienne pour l’exploitation rationnelle et optimale de ces richesses, sont en train d’être exploités à l’heure actuelle par des inconnus bien connus, de manière illégale et arbitraire, alors que notre petit peuple végète et patauge dans la misère atroce et abjecte.

 

Je rêve que l’université en Ayiti puisse redevenir ce qu’elle était dans le temps, cette force vive, cette intelligence, cette intégrité, cette perspective, cette vision, ce véritable grenier de l’intelligentzia ayisièn, cette alternative de la résurgence d’une nouvelle génération d’hommes et de femmes ayitien, sans distinction d’origine ethnique, d’appartenance sociale, de sensibilité politique, de confession religieuse, plus que jamais conscients du degré de gravité de la situation dégradante et deshumanisante dans laquelle le pays sombre de plus en plus.  Je rêve que cette institution de grand savoir assume la charge d’instigatrice du destin de renouveau qui lui incombe, pour enfin modeler nos élites et les préparer aux grandes responsabilités nationales qui les attendent.

18/03/18

Jean Camille Étienne

Cray.

 

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