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L’opposition n’oubliera peut-être pas le dossier PetroCaribe

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À l’initiative du secteur démocratique et populaire, un sit-in a été organisé le mardi 6 mars dernier, devant les locaux de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC/CA), pour exiger du tribunal administratif qu’il déclare son incompétence dans la poursuite de l’enquête sur l’utilisation des fonds PetroCaribe.  Les protestataires ont tiré à boulets rouges sur les anciens hauts fonctionnaires soupçonnés ou accusés d’avoir dilapidé plus de 3,8 milliards de dollars issus des fonds PetroCaribe, une somme due au Venezuela, alors que le pays s’englue chaque jour dans la misère.  Des enfants sont dans les rues pour réclamer le retour dans les salles de classe, de leurs enseignants qui n’ont pas été payés depuis des mois, des patients meurent, faute de soin dans les hôpitaux dont le personnel ne perçoit pas de salaires, alors que quelques citoyens ont dilapidé des milliards de dollars.  Il n’est pas normal que cela reste impuni, ont crié certains protestataires.

Ils ont réaffirmé leur volonté d’aller jusqu’au bout de leur mouvement, afin que tous ceux qui ont volé l’argent de l’État, en paient le prix.  Ils accusent les plus hautes autorités de l’État, dont le président Jovenel Moïse, de tout faire pour étouffer l’affaire.  Le 25 février dernier, la Mission des Nations Unies en Appui à la Justice en Haïti (MINUJUSTH), dans un communiqué, a salué la nomination de juges d’instructions qui prendront en charge les plaintes déposées dans le cadre du dossier PetroCaribe.  En toute vraisemblance, cet avis de la mission onusienne n’a pas réjoui les autorités haïtiennes, au point qu’elles l’ont étiqueté d’ingérence politique.  Du côté de l’opposition politique, la cloche sonne différemment. De l’avis de Me André Michel, porte-parole de « l’opposition démocratique unifiée », la MINUJUSTH est en droit de se prononcer sur ce dossier, puisqu’il s’agit d’un dossier de corruption.  Il dit constater que le gouvernement rentre dans un véritable bras de fer avec l’ONU pour une prise de position correcte, dans une conférence de presse donnée la semaine écoulée.  En revanche, ce que Me André Michel considère comme ingérence a été « la déclaration de l’ancien ambassadeur des États-Unis accrédité en Haïti, Kenneth Merten, voulant affirmer la nationalité de Michel Martelly, l’ex-président de la République, soupçonné à l’époque d’être détenteur de nationalités étrangères ».  « Nous avons besoin du support des Nations Unies et des autres pays dans le combat contre la corruption.  Ce n’est pas une question de politique ou d’ingérence, il s’agit d’entraide judiciaire », a fait savoir l’avocat.  À son avis, dans un principe de coopération et d’entraide judiciaire, aucun pays ne peut combattre seul la corruption.  Le fait par l’ONU d’intervenir dans un dossier de justice ayant rapport à la corruption et au blanchiment des avoirs, soulève-t-il, ne signifie pas une forme d’ingérence. Ainsi, André Michel clame que le mandat des Nations Unies leur donne le droit d’intervenir dans un dossier de « corruption », parce que c’est une infraction transnationale, au même titre que le blanchiment des avoirs ou le trafic de la drogue.

Wilson Laleau, ex-ministre de l’Économie et des Finances de l’administration Michel Martelly, sort de son mutisme. C’est l’une des rares prises de parole de l’homme, l’un des plus influents du régime Tèt Kale en cours.  Wilson Laleau, accusé, comme d’autres, dans le rapport d’enquête parlementaire sur l’utilisation et/ou dilapidation des fonds PetroCaribe, renvoie la chose sur le terrain politique.  « Ce ne sont que des règlements de comptes », jette Wilson Laleau, dans une longue entrevue accordée à un média basé à Miami, en Floride, et reprise en boucle sur les réseaux sociaux.  L’économiste, l’un des hommes forts du pouvoir de Jovenel Moïse, croit qu’il y a des « spécialistes qui peuvent faire ce genre d’enquête », appelant au « recrutement de gens compétents, internationalement reconnus.  Comprendre : pour lui, il est impensable de confier l’enquête sur l’utilisation de l’argent vénézuélien à des politiques.  Il s’en est également pris vertement à ceux qui l’ont mis en cause dans le rapport, sans les nommer.  « Les vrais bandits, les vrais fossoyeurs de la République se cachent et avilissent tout le monde dans le pays. »  Wilson Laleau, lui qui ne regrette rien de sa gestion après avoir été tour à tour, ministre du Commerce et de l’Industrie puis ministre de l’Économie et des Finances, cite le feu professeur Leslie Manigat, en qualifiant le pays d’une « bande de dégénérés ».  L’homme rappelle que parfois des gens lui demandent comment il vit, vu les accusations qui lui tombent dessus.  « Je leur réponds toujours que ce sont les gens qui parlent de moi qui ne doivent pas pouvoir vivre. »  Comprendra qui pourra.

Altidor Jean Hervé

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