Un musée à ciel ouvert. Une galerie de trente-trois portraits qui recouvre toute l’histoire musicale haïtienne. L’exposition « Je me souviens » s’étale sur les murs du Palais présidentiel. « Lui, c’est Ti Paris, natif de Jacmel. Il traînait sa guitare jusqu’à Port-au-Prince où il grattait son troubadour aux racines créoles », souffle un vieil homme, perdu dans la gouache d’Achile, auteur de l’hymne Lina, qu’on croit tailler pour une génération de compositeurs qui ont pillé la ligne mélodique. La voix tendre et plaintive du chanteur surfe ici dans sur un mielleux troubadour que Beethova Obas, digne héritier du chanteur, va reprendre par la suite en mode compas. Mais au-delà d’Achile qui hante encore la mémoire de toute une époque musicale où la créativité était mariée à la passion et au talent, il y a dans la foulée : Issah El Saieh, saxophoniste né à Petit-Goâve de parents palestiniens, célèbre compositeur du morceau culte « Woman in love », il adapte en musique « Choucoune », « Haïti chérie », « La sirène », La baleine », « Kouzen ». Le saxophoniste Issah El Saieh est celui qui s’est frotté avec de grands noms du jazz quand il poursuivait ses études aux USA. L’exposition « Je me souviens » opère une magistrale traversée historique en passant de Nemours Jean-Baptiste, créateur du Compas, à Webert Sicot, de Joseph « Joe » Trouillot (« crooner au timbre expressif ») à Michel Desgrottes, trompettiste virtuose à la tonalité atypique. Une galerie de trente-trois portraits qui forment le socle du panthéon musical haïtien : Gérard Dupervil, Gardner Lalane, Roger Colas, Ulrick Pierre-Louis, Anthony « Tony » Moïse, Yvon Louissaint, Émile Volel, « Ti Manno », Almando Keslin, Raymond « Ti Roro » Baillergeau, sans oublier Dòdòf Legros dont le nom fut immortalisé par Guy Durosier dans la chanson fétiche « Si w al an Ayiti ».