Le chef de l’État haïtien, Jovenel Moïse, affiche sa détermination à intensifier le dialogue avec les divers secteurs de la vie nationale en 2018. En adressant ses voeux à la nation, M. Moïse assure qu’il redoublera d’efforts pour renforcer le dialogue politique permanent. « Car je crois, et j’insiste, que le bon fonctionnement de l’État exige un exercice constant d’écoute et de compréhension mutuelle. Certains concitoyens ne partagent pas les mêmes orientations politiques que moi, je le reconnais. Au-delà de nos différences, nous nous rejoignons dans notre désir commun et notre volonté partagée de changer profondément notre pays », explique-t-il.
Le président Moïse veut rassurer tous ses compatriotes, opposants, supporteurs, jeunes, vieux, ouvriers, artisans, entrepreneurs, étudiants, enseignants, laïques, religieux, tous les Haïtiens indistinctement, « que la porte du dialogue vrai et constructif demeure ouverte pour que, dans le respect mutuel, nous puissions tisser ensemble l’entente nécessaire à la stabilité politique et sociale, dans l’intérêt supérieur de la Nation et pour le bien de notre chère Haïti ». Cette rencontre qu’avait annoncée le président, entre les représentants des trois pouvoirs (Exécutif, Législatif et Judiciaire) n’a pu avoir lieu, en raison de l’absence des représentants du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, notamment de son président, Me Jules Cantave. Les discussions devraient, entre autres, porter sur les déclarations que le président Jovenel Moise avait faites la semaine dernière à Paris et selon lesquelles, il aurait été contraint de nommer, en octobre dernier, une cinquantaine de juges soupçonnés de corruption, alors qu’il se présente comme le seul qui soit en mesure de combattre ce fléau en Haïti. Le numéro un du CSPJ, Me Jules Cantave, a confié qu’il n’a été qu’informé de la tenue de cette rencontre dont l’ordre du jour n’a pas non plus été clairement défini. Absent vendredi lors de la conférence de presse au cours de laquelle, les autres membres du CSPJ avaient dénoncé les déclarations du président Moïse, Me Jules Cantave a indiqué qu’il était prêt à rencontrer le chef de l’État à une date ultérieure. À en croire les déclarations du président du Sénat, Youri Latortue, qui, lui, a fait le déplacement, cette rencontre pourrait avoir lieu dans les prochaines 24 à 48 heures, selon les affirmations du président Moïse dont il a rapporté les propos. Il confirme que c’est en raison de l’absence du président du CSPJ que la réunion a été avortée.
Youri Latortue a aussi indiqué avoir exprimé auprès du président Moïse, ses désaccords avec les propos qu’il a tenus au sujet du rapport PetroCaribe et autour de la nomination (sous pression) de juges soupçonnés de corruption. Il est important pour les représentants des trois pouvoirs de maintenir un dialogue permanent, en vue de leur renforcement, a dit l’élu de l’Artibonite, ajoutant qu’il y va de la stabilité du pays.
Un porte-parole du CSPJ, Me Samuel Boussiquot, a indiqué que les membres du pouvoir judiciaire sont prêts à rencontrer le chef de l’État à n’importe quel endroit, hormis le Palais National. Alors que l’ensemble des secteurs de la vie nationale condamne les déclarations du chef de l’État, notamment autour de ses attaques contre l’appareil judiciaire, le député de Kenscoff, l’un des proches de Jovenel Moise à la Chambre basse, a tenté de le dédouaner de ses responsabilités. Le zélé parlementaire semble avoir trouvé en Heidi Fortuné, le ministre de la Justice, un bouc émissaire idéal. C’est lui, le premier conseiller du chef de l’État en matière de justice, et s’il n’avait pas été d’accord avec les propos du président Moïse, il aurait démissionné, a soutenu l’élu de la KID. Le député ajoute que c’est le ministre de la Justice qui envoie au président la liste des juges à nommer, et quand il le fait, le chef de l’État devrait signer «les yeux fermés». Et comme pour tenter de décrédibiliser davantage le Garde des sceaux de la République, Alfredo Antoine affirme déplorer que ce dernier n’ait pas envoyé ses représentants, trois (3) au total, pour siéger à la commission de certification des magistrats.
Emmanuel Saintus