Dans une tournure néfaste de la po litique haïtienne, on constate que dans les grands shows médiatiques, que ce soit à la radio, devant les écrans de télévision, dans les réseaux sociaux, riches ou pauvres, experts ou amateurs, on ne se demande plus qui est corrompu ou pas. Vainement, les gens, soi-disant plus ou moins corrompus, se disputent sur la classification des Haïtiens les plus corrompus, en les comparant aux moins corrompus. Tristement, les conversations s’orientent surtout sur le degré de corruption de nos gouvernants à tous les niveaux : exécutif, législatif et judicaire. Les grands hommes et femmes d’affaire ne sont pas non plus épargnés.
Certains journalistes, parfois fameux, souvent fâchés et trop souvent malheureux, attaquent sans pitié, citant ceux qu’ils appellent corrupteurs, corrompus, désignant quelques familles riches qui vivent dans les hauteurs de Port-Au-Prince. À leur tour, celles-ci répliquent en pointant du doigt certains medias qu’elles qualifient d’opposants et partisans qui, selon eux, sont à la solde de leurs adversaires dans les affaires. Certains analystes parlent même de guerre froide entre Haïtiens d’origines allemande et juive, juives et arabo-syrienne, tous, des bourgeois haïtiens représentant l’élite économique du pays. Ils font partie du 1% qui s’enrichit scandaleusement au détriment du reste de la population, selon certains bloggeurs.
Laissons de côté toute conspiration. Ce qui est important aujourd’hui, c’est qu’on doit tous s’accorder qu’Haïti s’enfonce, tous les jours davantage, dans ce méli-mélo de dénonciateurs dénoncés, d’accusés accusateurs, de protecteurs non protégés, de juges mal jugés, de persécuteurs persécutés, sans oublier des contrôleurs contrôlés. Les trompeurs se font passer pour des victimes de leurs propres tricheries. Ils s’accusent et se défendent sans besoin d’un cabinet d’avocat car, avec un micro ou un marqueur et un tableau, on peut tout expliquer. Pas la peine de s’excuser car on est tous innocents. Résultat : c’est la confusion chronique et généralisée. Le peuple ne sait plus sur qui s’appuyer en affichant méfiance et mépris à l’égard des appels de rassemblement de nos leaders politiques. Crevés et abusés par les politiciens, pendant les trente dernières années, nos compatriotes tournent la face vers la Vierge Marie, répondant par centaines de milliers à la convocation de l’Église catholique.
Rodelyn Almazor
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