Arrivera-t-on à ne plus avoir à ac cueilli nos compatriotes à la fron tière haïtiano-dominicaine ? Encore une fois, l’armée dominicaine a entrepris cette semaine un renforcement de la surveillance à la frontière avec Haïti. 236 nouveaux soldats ont été dépêchés dans la zone frontalière pour lutter contre les trafics de migrants illégaux, d’armes et de stupéfiants. Le commandant du 10e bataillon de l’armée, à Dajabón, a indiqué que les nouveaux soldats renforceront le travail effectué dans la partie Nord de la frontière dominicaine-haïtienne.
L’armée dominicaine a annoncé que 1 435 Haïtiens sans papiers, appréhendés à la frontière, sont en détention. Par ailleurs, la Direction Générale des Migrations (DGM) informe avoir arrêté 555 Haïtiens sans documents migratoires légaux, dans des communautés de la Province de Puerto Plata (Nord). Les arrestations ont eu lieu dans le cadre des opérations de contrôles migratoires d’étrangers en situation irrégulière dans les communautés de Los Cangrejos, Los Muñoz, Los Pérez, Los Charamicos et de La Unión, ainsi que des municipalités de Sosua, Imbert et Montellano. Les forces de l’ordre intensifient les opérations de grande envergure, réalisées grâce à l’implication du service de renseignement.
Récemment, plusieurs centaines de migrants haïtiens avaient été rapatriés à la suite d’opérations réalisées dans les régions de Boca Chica, San José de Ocoa, à Samana, La Vega, Maria Trinidad Sanchez, Santiago Rodriguez, Espaillat, La Altagracia, Santiago et Santo Domingo. Au cours du mois de novembre 2017, 5 579 personnes rapatriées ont été enregistrées au niveau des quatre points frontaliers officiels haïtiano-dominicains. 417 autres dont 8 rapatriées et 409 retournées spontanées ont été aussi recensées à Cornillon/Grand-Bois. Parmi les personnes rapatriées, figurent 4 909 hommes, 591 femmes et 79 mineurs (8 fillettes et 71 garçonnets). La plupart des migrants rapatriés ont vécu en République Dominicaine pendant de nombreuses années. Ils travaillaient dans le secteur agricole, la restauration et dans le domaine de la construction. Certains d’entre eux ont souligné avoir été reconduits en Haïti bien qu’ils soient en possession de visa dominicain valide. Tel a été le cas de deux ressortissants haïtiens dont un étudiant en génie civil. Ce dernier a indiqué avoir été brutalement intercepté à Santo Domingo et rapatrié à Carisal/Comendador (Elias Piña), le 21 novembre 2017. Les migrants haïtiens ont dénoncé les conditions dans lesquelles ils ont été gardés dans les centres carcéraux dominicains, avant d’être reconduits à la frontière. Ils se sont plaints d’avoir été contraints de dormir à même le sol pendant leur incarcération, sans avoir accès à l’eau potable et à la nourriture. La presse dominicaine, qui se devait d’être impartiale, a pris fait et cause pour son peuple, en traitant de tous les maux, les Haïtiens en terre voisine. Les chefs d’accusation portés contre nos compatriotes sont : assassinats, agressions et viols.
Pour le journal, ces transgressions sont accablantes, tant par l’intensité de la colère déchargée sur les victimes, que par la cruauté avec laquelle les agresseurs tuent ou décapitent. La dernière goutte d’eau qui fait déborder le vase est l’assassinat, la semaine dernière, de Joneury Daniel Incarnation, un enfant de trois ans dont le corps a été retrouvé au bord d’une route. Selon la police nationale dominicaine, l’Haïtien Rafael Michael est identifié comme co-auteur (avec un mineur dominicain de 17 ans) de ce crime et est actuellement enfermé en prison.
En attendant que le procès s’ouvre, Listin Diario parle d’« acte inqualifiable et inacceptable » avant de tenter une comparaison entre les deux peuples. « Ils [ndlr, les Haïtiens] ne sont pas seulement prêts à perpétrer la violence avec des pierres, des bâtons ou des machettes contre leurs victimes, que ce soit dominicaine ou leurs propres compatriotes, mais portés par l’ignorance ou l’arrogance, […] ils font des
choses que les Dominicains modestes n’osent même pas.»
Emmanuel Saintus